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Pierre S. Adjété
Pierre S. Adjété
Né à Lomé, PSA a fait ses études au Togo, au Gabon et au Canada. Économiste, administrateur et essayiste, PSA est un partisan assumé du «Grand Pardon» et un adepte de l’Éthique dans l’espace public; il est un acteur engagé dans des initiatives citoyennes et républicaines.




Sans polémique, partons de l’hypothèse qu’Ali Bongo Ondimba a eu son doctorat en droit. Docteur en droit autant que son ministre de la justice démissionnaire, Séraphin Moundounga.


Jean Ping et Barack Obama
Jean Ping et Barack Obama

Il est néanmoins pathétique de voir comment, entre juristes, Séraphin Moundounga se réfère au principe de droit pour appeler au recomptage des votes, bureau par bureau dans le Haut-Ogooué, alors qu’Ali Bongo Ondimba ne base son refus de recomptage sur rien d’autre que l’affirmation qu’il ne peut violer la loi tel qu’elle est.

C’est un peu court, en termes de rigueur intellectuelle, quant à la thèse évasive du refus d’Ali Bongo Ondimba. Pour un docteur en droit, il serait utile qu’un énoncé de principe en la matière vienne éclairer et supporter le refus du chef d’État gabonais.

Lorsqu’on sait que nos chefs d’État sont prompts à se payer tous les experts malveillants de ce bas monde, il est encore plus surprenant que l’argumentaire d’Ali Bongo Ondimba soit si faible en réalité.

Textuellement, l’autre juriste Séraphin Moundounga nous éclaire en rappelant que : « ce qui n’est pas formellement dit n’est pas interdit ». Ce fondement acceptable du droit nous permet d’avancer, suffisamment, vers la nécessité du recomptage des voix qui ne prendra d’ailleurs qu’un simple après-midi avec une bonne bière Régab à portée de main; particulièrement, pour une province du Haut-Ogooué qui normalement ne devrait même pas avoir 50 000 des 628 000 électeurs gabonais inscrits en cette année 2016 et qui a été généreusement ajustée à plus de 71 000 votants, malgré la défection décisive de plusieurs cadres de la province ayant rejoint Jean Ping.

Évidemment la généreuse excroissance, rapide et tardive, des inscrits de la province du Haut-Ogooué n’a échappé à personne. C’est probablement la réelle anomalie que ne peut justifier raisonnablement et statistiquement Ali Bongo Ondimba, en se réfugiant dans le refus injustifié du recomptage.

En vérité, Ali Bongo Ondimba a joué et perdu cette fois-ci. On ne peut pas passer sa vie à voler les élections, détourner le suffrage de ses concitoyens et ouvrir un conflit avec les observateurs de l’Union européenne en prétendant que certains ont pris parti pour Jean Ping et ainsi outrepassé les attributions convenues dans le cadre de leur mission.

Ali Bongo Ondimba s’accroche à tout, saut à l’éthique. Pour un docteur en droit, il doit bien savoir que l’éthique est au-dessus de la loi, et surtout que le droit ne peut nullement se réduire aux seuls faits, mais embrasser tout le contexte, toute la réalité scientifique, sociale, statistique et tout ce qui entoure les résultats fantaisistes et maladroitement forgés pour le Haut-Ogooué.

Ali Bongo Ondimba a joué et perdu cette fois-ci, et à la face du monde. Seule, l’éthique pourra sauver désormais le soldat de la cause perdue de la démocrature qu’est devenu Ali Bongo Ondimba. Et ça presse, pour l’honneur et pour la république.

Ad Valorem


le 07/09/2016 à 20:38



Au commencement étaient des élections apaisées. Puis, sept provinces sur neuf plus tard, comme toujours, les choses ont commencé par s’obscurcir, les résultats électoraux sont détournés, tripatouillés et ajustés pour défier toute la logique décelée en amont. Un surprenant taux de participation de plus de 99% dans le Haut-Ogooué viendra alors semer le grand doute sur l’intégrité des résultats provisoires.


Jean Ping, le vainqueur logique des présidentielles
Jean Ping, le vainqueur logique des présidentielles

Manifestement, l’étau se resserre sur le président Ali Bongo Ondimba (ABO). Le carnage réalisé par sa garde rapprochée, la Garde républicaine, au Quartier général du candidat Jean Ping joue désespérément à la défaveur du chef d’État gabonais. Et, la justification changeante d’un tel acte de pure barbarie politique n’arrange en rien le cas ABO.

Ce qu’il est convenu d’appeler « une évidente anomalie » comme l’a fait ressortir Mariya Gabriel, l’Observatrice-en-chef de la Mission d’observation électorale (MOE) de l’Union européenne (UE). Dans son communiqué, la MOE de l’UE est allée aussi loin que possible dans son désaveu de la consolidation et de la publication des résultats de la province d’origine du président gabonais.


Un ajustement électoral évident

« C'est avec profonde tristesse que je note la perte de vies humaines et la violence qui ont suivi la proclamation des résultats provisoires par le ministre de l'Intérieur. Je tiens à adresser mes sincères condoléances aux familles des victimes.

La MOE a relevé des différences substantielles entre les diverses commissions électorales locales et provinciales au niveau des procédures et des délais appliqués, et de l’accès offert aux observateurs, pendant la phase de la consolidation des résultats. Les observateurs de la MOE ont été autorisés à assister aux annonces publiques des résultats provinciaux dans 7 des 9 provinces. La MOE note que les résultats n'ont pas été annoncés publiquement par l'autorité responsable dans la province du Haut-Ogooué, en privant ainsi les parties prenantes de la transparence requise par la loi.

Je note en particulier que l'opacité révélée dans la gestion du processus dans cette province contribue à fortement diminuer la confiance des électeurs et des parties prenantes. Le taux de participation de 99,93% dans le Haut-Ogooué est nettement supérieur à ceux enregistrés dans les autres provinces, estimé en moyenne à 48%. Une analyse portant sur le nombre de non-votants et des bulletins blancs et nuls révèle une évidente anomalie dans les résultats finaux du Haut-Ogooué. L'abstention observée dans une des quinze commissions électorales locales est à elle seule supérieure à l'abstention déclarée par la CENAP pour l'ensemble de la province. L'intégrité des résultats provisoires dans cette province est par conséquent remise en cause.

Afin de restaurer la confiance des Gabonais, je réitère mon appel fait aux autorités gabonaises, à publier les résultats bureau de vote par bureau de vote dans l'ensemble du pays, ceci afin de faciliter un possible recours, qui reste la voie pour résoudre, dans le respect de la loi, la crise de confiance dans les résultats.
»

Manifestement, l’UE est très loin du simple manque de transparence du début pour passer à une remise en cause acide des résultats par ses observateurs.

Léon-Paul Ngoulakia, un soutien de taille qui a manqué à Ali Bongo Ondimba
Léon-Paul Ngoulakia, un soutien de taille qui a manqué à Ali Bongo Ondimba



Une famille Bongo divisée

Voilà donc que l’incapacité des autocrates à se tirer d’affaire s’est encore vérifiée avec une interview catastrophique d’un Ali Bongo Ondimba sous pression. Exceptionnellement, il a accepté de se prêter aux questions de Radio France Internationale (RFI). Véritable bérézina, Ali Bongo Ondimba (ABO) devenu d’ailleurs Bongo Ondimba Ali (BOA) sur les médias sociaux n’a pas fait mieux que de justifier ses résultats à la soviétique, en invoquant la campagne électorale menée par son adversaire Jean Ping.

Cette argumentation avait comme été anticipée par le propre frère d’Ali Bongo Ondimba, Christian Bongo Ondimba tout comme des cadres démissionnaires, ministres et responsables de fédération du Parti démocratique gabonais (PDG). Ces personnalités dont la liste s’allonge n’ont pas hésité à rendre leur tablier face à l’inacceptable perversion des résultats accompagnée d’une répression aussi meurtrière des contestataires. Pour Christian Bongo Ondimba aucun « repli identitaire réducteur » n’existerait dans le Haut-Ogooué au profit de qui que ce soit, fut-il Ali Bongo Ondimba.

Auparavant, déjà, les réseaux sociaux se sont emballés à la suite de la désignation de Jean Ping comme gagnant par l’une des sœurs d’Ali Bongo Ondimba lui-même, la petite fille de président congolais Sassou Nguesso, Hirmana Loïse Sassou Nguesso Bongo Ondimba. Son message disait ouvertement : « Félicitations à Jean Ping, merci à tous les électeurs pour cette mobilisation d'exception, merci au président sortant Ali Bongo Ondimba, merci à tous les gens qui sont restés dans les bureaux afin de s'assurer de la transparence des résultats »

Mais il y a désaveu d’entre les désaveux qu’Ali Bongo Ondimba a connus durant cette élection présidentielle. Si Pascaline Bongo a choisi de se taire en ne choisissant pas entre son ex-mari et son frère, on ne le dira jamais assez, l’appui de Léon Paul Ngoulakia, le cousin germain pour ne pas dire le frère d’entre les frères, à Jean Ping présageait même de la difficulté d’Ali Bongo à obtenir l’unanimité dans la province du Haut-Ogooué.

Sur la défensive, Ali Bongo Ondimba prétend que les procès-verbaux ont été manipulés par l’équipe de Jean Ping en plus de nier tout mécontentement politique spontané au Gabon, Libreville particulièrement. L’espace de dégagement se réduit autour d’Ali Bongo Ondimba, d’autant plus que la famille Bongo, désunie dans les circonstances, est loin de procurer un appui au chef d’État gabonais. Bien au contraire. Et surtout, c’est tous les Gabonais, famille ou pas de Bongo qui veut la paix sociale, le bien-être et la démocratie dans le pays.

Silence


Rédigé par psa le 07/09/2016 à 03:52



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