Monarchie, tu ne demanderas point à devenir République
Finalement, la longue marche des Gabonais vers la démocratie et qui n’est rien d’autre que la volonté profonde de mettre fin au règne de la dynastie Bongo sur le Gabon, depuis 1965, va se poursuivre. Une fois de plus, la Cour constitutionnelle n’a pas restitué la force du droit en considérant toutes les évidences de l’invraisemblance contenue dans la victoire orchestrée dans la province du Haut-Ogooué.
La Cour constitutionnelle a même délité le droit à l’espoir chez une population jeune, la première richesse du Gabon, qui a su dépasser les clivages provinciaux ainsi que tous les pièges du vote ethnique depuis que le candidat Jean Ping avait réussi à rassembler les ténors de l’opposition jusqu’à certains membres de la famille présidentielle.
L’évidente anomalie de la victoire du président sorti, Ali Bongo Ondimba, va être confirmée par une Cour constitutionnelle manifestement peu courageuse, pour entrer dans la grande Histoire du Gabon qui s’écrivait sous les yeux du monde entier. Le refuge souverainiste de la Cour n’a pu s’allier à la nécessaire transparence républicaine attendue de l’institution. La fameuse tour de Pise gabonaise est restée penchée du même côté, celui du pouvoir : le recours de Jean Ping a été rejeté et, en pleine nuit, le résultat balancé.
République, levez-vous! Monarchie vous êtes, monarchie vous resterez! La fébrilité de l’attente s’est transformée en désespoir, en consternation, en colère, en brusquerie et en inhumanité. Trois familles de choix essentiels étaient possibles face au litige électoral dans toute sa gravité : l’annulation, la confirmation et l’inversion des résultats électoraux. La pire de toutes les options a été choisie : l’incertitude de l’iniquité par la reconduction du statu quo.
La présidente de la Cour constitutionnelle, Marie-Madeleine Mborantsuo, n’est ni Salomon encore moins Aristote pour exemplifier, devant tout le monde, la médiété recommandable dans tous les cas aussi extrêmes. Déjà, dans la session plénière de la messe plénière du jeudi 22 septembre, après avoir entendu les dernières représentations des avocats des deux parties, Marie-Madeleine Mborantsuo n’a pas su jouer la transparence même sur la date et l’heure de communication de la décision capitale attendue depuis si longtemps. À sa guise, tout devrait venir plus tard, selon sa manière et sur sa convocation.
Deux semaines durant, la Cour constitutionnelle gabonaise ne s’était imposé aucun calendrier rigoureux. En pareille circonstance d’urgence républicaine, l’imprécision est la marque de l’irrésolution. C’est la lecture faite par les Gabonais. Et la désolation, l’inquiétude, a gagné les cœurs et les esprits, à l’intérieur comme à l’extérieur du Gabon.
Les rues, les quartiers et les matiti de Libreville et Port-Gentil, surtout, sont mis sous surveillance. Une fois de plus, les lieux de rencontre de l’état-major du candidat Jean Ping sont pris en étaux par les forces de sécurité. Les appels et les communications toujours sous un contrôle serré. La démocratie vite immolée, la monarchie Bongo est réinstallée. Ali Bongo Ondimba se précipite encore pour appeler à un dialogue avec Jean Ping. Le jeu!
Comme pour faire un poing levé, les cinq doigts du désespoir, de la consternation, de la colère, de la brusquerie et de l’inhumanité se sont refermés chez la majorité des Gabonaises et des Gabonais. L’innocent Gabon vert-jaune-bleu, désormais souillé du rouge sang, ne serait plus le même après tant de déchirures. Ici et là, des larmes de blessure pour mieux le dire… Continuez, fils à papa; la honte vous va si bien. Mais, la démocratie aura le dernier mot sur vous!