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Pierre S. Adjété
Pierre S. Adjété
Né à Lomé, PSA a fait ses études au Togo, au Gabon et au Canada. Économiste, administrateur et essayiste, PSA est un partisan assumé du «Grand Pardon» et un adepte de l’Éthique dans l’espace public; il est un acteur engagé dans des initiatives citoyennes et républicaines.




MANCHESTER, NH - Barack Obama est devenu un astucieux cheval gagnant. Mais quel est donc son truc secret?


Obama retrouve son ton. Et ça sonne vrai.

Le puissant discours qu'il a développé dans les dernières étapes de la campagne d'avant Noël est une oeuvre de toute beauté, un discours de 40 minutes prononcé sans notes qui renforce ses chances pour le caucus de l'Iowa le 3 Janvier et pour la première primaire, ici, à New Hampshire cinq jours plus tard.

Hillary Clinton n'a rien pour l'égaler. John Edwards a de périodiques accès d'éloquence. Mais Obama a atteint un niveau tel qu'il est en mesure de livrer un discours personnalisé, pratiquement sur commande, et d'atteindre différents publics avec un effet assuré. Son discours est sans faille et est devenu son doudou confortable.

Ce discours a été lancé à la Jefferson-Jackson Dîner à Des Moines plus d'un mois auparavant lorsque Obama avait encore du mal à rivaliser avec Clinton et Edwards dans l'Iowa. Il a tout de suite suscité des critiques dithyrambiques de ce grand auditoire et du chroniqueur David Yepsen de Des Moines Register, et Obama savait qu'il avait là un cheval gagnant.

Il l'a donné de nouveau à la tribune du Comité national démocratique lors du Forum des candidats dans le Nord de la Virginie et a obtenu des éloges. Alors il donna le même type de discours quatre autres fois, quand il était en tournée de campagne avec Oprah Winfrey à Des Moines et Cedar Rapids, en Iowa; à Manchester, et à Columbia, SC, devant une foule palpitante d'environ 60000 personnes dans les quatre endroits.

Il livre le même discours maintenant dans les petites villes de toute l'Iowa, et ici, dans le New Hampshire, il l'a donné plus de six fois en deux jours la semaine dernière.

C'est une oraison grandiose de discours. À l'instar de certaines des symphonies de Beethoven, il commence sur une assez calme et même langoureuse note. Il rencontre une première salve d'applaudissements en rappelant au public que l'an prochain "George Bush, ce nom, ne sera pas sur le bulletin de vote." Les Démocrates acclament alors le futur départ de l'homme qu'ils méprisent. Et puis Obama blague, "Ni mon cousin, Dick Cheney". Tournure délicate pour faire découvrir aux gens que lui aussi faisait partie de la famille."

Il semble revenir après à un ton normal en faisant remarquer l'importance de la prochaine élection, pour rapidement transformer ses propos en une flèche en direction de Hillary Clinton, même s'il ne fait pas mention de son nom. En raison des enjeux, dit-il, il ne suffit pas de changer ou de présidents ou de parti politique dans cette élection à venir; la triangulation et le simple ajustement ne seront pas suffisants."

Puis Obama se paye le style populiste à la Edwards --s'en prenant aux entreprises de lobbyistes de Washington, qui ont bloqué pendant des années les politiques sur les soins de santé et la législation en matière d'énergie- aucune d'entre elles, promet-il, ne figurera dans l'agenda d'une journée de travail d'une administration Obama.

Puis il accélère les pulsions cardiaques de divers membres des organes constitutifs du parti démocratique, promettant du travail pour élever le salaire minimum à chaque année; se faisant aussi prometteur de salaires généreux aux enseignants et aux bons étudiants de nouvelles bourses et aides scolaires pour payer leurs frais de scolarité.

Et enfin, vient la péroraison, citant Martin Luther King sur «l'urgence de maintenant», en expliquant pourquoi il ne peut pas attendre patiemment son tour pour une autre élection présidentielle. Ce chemin est un peu comme une passerelle parce qu'il veut insister sur une autre différence avec Hillary. Contrairement à d'autres, dit-il, il n'avait pas un plan de carrière depuis des années pour cette fonction et il ne considère pas non plus la présidence comme son droit ou quelque chose qu'on lui doit.

L'anecdote de clôture est basée sur un incident survenu lors d'un rassemblement à Greenwood, SC, où, par un matin miséreux, devant une maigre foule, une seule femme noire présente dans l'assistance à la toute première sortie publique d'Obama, a ravivé l'ambiance de toute la salle en criant des mots d'encouragements et en réussissant à faire chanter tout le monde, et faire scander, "Fired up!" "Ready to go!"

Losqu'il raconte cette histoire devenue familière, Obama adopte une tonalité propre à une conversation avant de passer à celle d'un cri de ralliement et explique que le chant est devenu sa marque de commerce et un slogan. Donc, il dit à son auditoire, "J'ai une chose à vous demander. Êtes-vous FIRED UP? Êtes-vous PRÊT À ALLER? FIRED UP! READY TO GO!"

Et puis, comme le cri devient presque trop fort à supporter, il ajoute les cinq mots de son message bien rôdé et renvoie ses électeurs à leurs manteaux d'hiver et à la porte dans un brouhaha général: «Let's go! Allons changer le monde", lance Obama. Et ça sonne vrai.

Dans toutes les foules que j'ai vues, il y a une vibration de pure énergie électrique sur ces dernières paroles. Des larmes coulent sur certaines joues - et certaines personnes ont l'air un peu foudroyées par le message.

David S. Broder, Washington Post, 23 décembre 2007


Ad Valorem


Rédigé par psa le 22/12/2007 à 18:23
Tags : obama Notez Trackbacks (0)



De la politique au Canada en ces temps de bilan, c'est probablement la synthèse qu'il faut lire, notre Tepidarium relaxant et comparatif. Comme quoi: Blanc bonnet, Bonnet blanc...


Chasseriau, Le Tepidarium
Chasseriau, Le Tepidarium
"La lecture des journaux, en cette fin d'année 2007, ne laissera pas un très bon souvenir à Stephen Harper. Son attitude agressive, ses attaques personnelles et sa partisanerie alimentent des commentaires extrêmement sévères à son endroit. Encore hier, le chroniqueur Don Martin se permettait un jeu de mots assassin dans le National Post et le Calgary Herald. «Harper a les moyens [means] mais est-il trop mesquin [mean]?»
Martin se demande pourquoi un premier ministre qui a gouverné sans scandale n'arrive pas à solidement devancer la faible opposition libérale dans les sondages. En fait, les conservateurs sont même moins populaires maintenant qu'ils l'étaient aux élections du 23 janvier 2006. L'hypothèse de Martin: «Il est un leader-né, mais il fait trop souvent preuve d'une agressivité partisane et est trop prompt à user d'intimidation pour que les Canadiens soient à l'aise avec l'idée qu'il soit majoritaire.»

James Travers, du Toronto Star, va dans le même sens et parle du «paradoxe Stephen Harper». «Au moment de gérer une crise, le premier ministre emmêle ses talents de leader, que les Canadiens admirent, et sa mesquinerie de petit dur de cour d'école, qui révulse [ces mêmes Canadiens].» Par conséquent, il peut être difficile de convaincre des indécis de voter pour un premier ministre qui les met mal à l'aise. Car «ils ne savent pas s'il peut calmer ses pires instincts quand la conciliation et le compromis, et non une bagarre de ruelle, servent mieux les intérêts du pays».

Le Globe and Mail s'est montré impitoyable. Dans un premier éditorial, il fait état de la partisanerie qui a conduit le gouvernement à demander à Daniel Paillé d'enquêter sur les dépenses de sondages des gouvernements précédents. Le quotidien s'amuse du résultat. Daniel Paillé n'a rien trouvé pour embarrasser les libéraux. Ce sont les conservateurs qui ont été démasqués. Ils ont dépensé davantage en sondages que les libéraux avant eux, assez pour tenir plus de deux sondages par jour ouvrable, certains versant carrément dans la partisanerie. «Ce rapport expose les dangers d'une partisanerie débridée», écrit le Globe.
Le quotidien dénonce dans un second éditorial les attaques du premier ministre à l'endroit de la présidente de la Commission canadienne de sûreté nucléaire à la suite de la fermeture du réacteur de Chalk River et de la pénurie d'isotopes radioactifs qui en a découlé. Au lieu de débattre du fond de la question, à savoir le non-respect par Énergie atomique du Canada des conditions de fonctionnement du réacteur, «le premier ministre a inventé un complot voulant qu'une fonctionnaire de carrière, qui tentait de faire respecter les règles en matière de sûreté nucléaire, aurait en toute connaissance de cause mis des vies en danger. Et pourquoi? Pour aider les libéraux à marquer des points contre les conservateurs. Voilà de la politique poubelle», tranche le Globe, indigné. «En d'autres mots, poursuit-il, diffamer quelqu'un au profit de tactiques parlementaires n'est pas un défaut. De toute évidence, le gouvernement prend plus au sérieux la politique partisane que la sûreté nucléaire ou l'organisme créé pour y veiller, et il ne se soucie guère de qui en sortira blessé.»
Toujours dans le Globe, Brian Laghi constate que, si Stephen Harper a le don d'exploiter les faiblesses de ses adversaires, il semble incapable de gérer les crises inattendues avec doigté et a de la difficulté à improviser lorsque les événements le forcent à s'écarter de son plan de match. Laghi cite des conservateurs anonymes qui confirment que le premier ministre a besoin de temps pour réfléchir et qu'il prend trop de décisions lui-même, ce qui le prive parfois du recul nécessaire.

Susan Riley, du Ottawa Citizen, est plus dure dans un texte repris par la plupart des journaux de CanWest. Selon elle, Harper devra bientôt «nous rappeler en quoi son gouvernement est plus transparent, plus honnête et plus responsable que les libéraux». Elle note le temps écoulé avant de rendre public le rapport Paillé et la décision de le faire le jour de la comparution de Brian Mulroney afin qu'il passe inaperçu et de ne pas exposer le recours abusif aux sondages par les conservateurs. Toujours le même jour de la comparution de Mulroney, le gouvernement a annoncé sans bruit que le Canada rejoignait un club de pays faisant la promotion de l'énergie nucléaire, une initiative de George W. Bush. Après avoir cité d'autres dossiers passés en douce ou soustraits au débat, elle évoque un air de déjà vu. Ce qui lui a fait prédire, avant même les entrevues de fin d'année de Harper, qu'il n'y aurait pas d'enquête publique sur l'affaire Murloney-Schreiber. À suivre.

Sur le plan de l'éthique, les conservateurs se voulaient plus blancs que blancs, surtout dans leurs relations avec les lobbyistes. Ils ne sont peut-être pas à leur solde, mais il faut croire qu'ils peuvent avoir leur oreille puisque certains des leurs n'ont pas hésité à se lancer dans cette industrie. Don Martin, du National Post, évoque le cas de Ken Boessenkool, qui a travaillé étroitement avec Stockwell Day, aujourd'hui ministre de la Sécurité publique et responsable de la GRC, avant d'aider tout aussi assidûment Stephen Harper. Boessenkool est maintenant le lobbyiste à embaucher à Calgary et son dernier client n'est nulle autre que l'entreprise Taser International. La Loi sur la responsabilité des conservateurs prévoit pourtant un délai de cinq ans avant qu'un attaché politique puisse approcher ses anciens patrons à titre de lobbyiste. Mais on attend toujours les règlements. Martin cite un expert qui souligne à quel point le fait d'avoir ses entrées auprès des principaux acteurs du gouvernement actuel est de plus en plus précieux puisque ce dernier est dirigé par un cercle très fermé d'individus. «Qui vous connaissez au bureau du premier ministre est toujours la voie rapide pour obtenir qu'Ottawa agisse», conclut Martin."
Manon Cornellier, Le Devoir


Mot à Maux


Rédigé par psa le 22/12/2007 à 09:37



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