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Pierre S. Adjété
Pierre S. Adjété
Né à Lomé, PSA a fait ses études au Togo, au Gabon et au Canada. Économiste, administrateur et essayiste, PSA est un partisan assumé du «Grand Pardon» et un adepte de l’Éthique dans l’espace public; il est un acteur engagé dans des initiatives citoyennes et républicaines.




Prenez une étude aux conclusions discutables, et versez-la dans une revue méconnue: la recette n’aura aucun succès. Mais ajoutez-y un soupçon d’agenda médiatique bien verrouillé, et vous obtiendrez une belle histoire qui intéressera le public. Jeudi, l’annonce de la découverte en Afrique du Sud de plus de 1500 ossements appartenant à une nouvelle espèce humaine baptisée Homo naledi a eu droit aux honneurs médiatiques. Pourtant, plusieurs éléments nous invitent à la prudence. Naledi, c'est l’ancêtre qui ne dit pas tout; ce cousin qui n’en était peut-être pas un.


Les armes détruisent l'humanité
Les armes détruisent l'humanité


«Notre nouveau cousin», «un visage qui change l’histoire de l’homme»… Jeudi, l’annonce de la découverte en Afrique du Sud de plus de 1500 ossements appartenant à une nouvelle espèce humaine baptisée Homo naledi a eu droit aux honneurs médiatiques. Tous les titres, ou presque, ont fait les éloges de cette étude publiée par une petite cinquantaine de spécialistes, pour certains prestigieux. Pourtant, malgré la qualité incontestable des fouilles, plusieurs éléments invitent à la prudence concernant les conclusions.

Sur le terrain, tout d’abord. Manque de chance pour les scientifiques, la configuration de ces ossements trouvés dans une caverne ne permet pas de les dater, ce qui empêche toute velléité de reconstruire l’arbre généalogique d’Homo sapiens, autrement dit nous, en plaçant ce nouveau venu sur la branche idoine.

Dans la publication, ensuite. Comment diable une si extraordinaire découverte a-t-elle atterri dans la revue scientifique en libre accès eLife, dont le facteur d’impact – l’étalon-or des publications – semble bien modeste (9,3) comparé à celui des mastodontes que sont par exemple Science (33,6) ou Nature (41,4)? Sans doute parce que ces dernières ont refusé de la publier, jugeant les conclusions quelque peu hâtives compte tenu de l’absence de datation.

Dans la communication, enfin. Le communiqué de presse prévenant de cette découverte a été envoyé aux journalistes la veille de la publication dans eLife, alors qu’il est d’usage de leur laisser plusieurs jours afin de recueillir des témoignages contradictoires et de faire des recherches approfondies.

Remarquons également que derrière cette étude se trouve la National Geographic Society, qui a financé en partie les fouilles et dont le documentaire relatant toute cette histoire doit être diffusé à la télévision le mercredi 16 septembre. Une date butoir qui a très bien pu conduire l’équipe de recherche à publier coûte que coûte, et tant pis pour les revues prestigieuses.

Prenez une étude aux conclusions discutables, et versez-la dans une revue méconnue: la recette n’aura aucun succès. Mais ajoutez-y un soupçon d’agenda médiatique bien verrouillé, et vous obtiendrez une belle histoire qui intéressera le public. Et tant pis si tout est (peut-être) complètement faux. En cuisine comme en science, il faut avoir le sens de la mesure, au risque de rendre malades les convives.


Une critique de la guerre

À chacun sa controverse. Au Québec, c’est la page couverture de l’agenda d’une association étudiante qui fait débat. Et pourtant, ce message ne pouvait être que de paix. En effet, le squelette d’un soldat dont les bras et les jambes sont formés par un arsenal d’armes orne la page couverture de l'édition d'automne de l’agenda du Collège de Maisonneuve à Montréal.

Le Collège de Maisonneuve a défrayé la chronique, le printemps dernier, quand quatre de ses élèves, arrêtés à l'aéroport Montréal-Trudeau par la Gendarmerie royale du Canada (GRC), ont été soupçonnés d'avoir voulu gonfler les rangs des combattants djihadistes en Syrie. Cette opération de la GRC portait à plus d'une dizaine le nombre d'arrestations de jeunes fréquentant cet établissement pour des liens présumés avec des activités terroristes.

À la SOGEECOM, on a prévenu les médias, qu'aucun entretien ne serait accordé au sujet du choix des illustrations. Dans un communiqué, l'association étudiante a souligné par la suite que des « critiques sont émises » chaque année. Dans ce cas-ci, elle ajoute que l'agenda se veut « une critique de la guerre, et non un appel à la violence ».

« La couverture d'automne est une œuvre d'art [...] symbolisant le fait que les armes détruisent l'humanité. Celle d'hiver représente la paix, le renouveau, et symbolise l'idée que nous sommes capables de mieux que la guerre. Les textes qui figurent dans l'agenda sont une réflexion sur le fléau que sont les conflits armés », a aussi écrit la SOGEECOM. /////////Fabien Goubet /Sara Champagne

Mot à Maux


Rédigé par psa le 11/09/2015 à 06:36



Le chantage journalistique, cette facilité à délaisser le vrai pour le faux qui fait la fortune de certains journaux et journalistes, connaît son heure de déshonneur. C’est pratiquement la main dans le sac que les journalistes français Éric Laurent et Catherine Graciet ont été pris, à la faveur de quelques rencontres, enregistrements de conversations, engagements manuscrits, avance réclamés et perçus : les deux journalistes s’engageaient ainsi à « ne plus rien écrire sur le roi du Maroc, en contrepartie du versement de la somme de deux millions d’euros ». Pudiquement, ça s’appellerait : accord financier ou échange de bons procédés. Quelle idée et quel acte désespéré que d'abandonner ses convictions pour céder à une rémunération fortuite et passagère. Quel abandon! Quel renoncement!


"Notre ami le Roi M6"
"Notre ami le Roi M6"


Le détour par l’Afrique est devenu très rentable pour une classe de journalistes. Le fils Mitterrand lui-même, journaliste chassé de Lomé par une dictature, n’a pas hésité à devenir un habitué du même régime Gnassingbé Eyadema. On se souvient de Cheikh Yérim Seck alors journaliste à Jeune Afrique qui n’a pas hésité à réclamé quelques centaines de milliers de dollars à Dadis Camara, chef de junte guinéenne, moyennant le polissage de son image dans le magazine panafricain.

Les exemples sont nombreux et scabreux, particulièrement au moment des élections présidentielles en Afrique, les dernières du Togo en avril 2015 n’y ayant pas échappé, tant les reportages de certains journalistes –radios, télévisions et presse écrite, laissaient clairement transparaître leur corruption manifeste. La cible Afrique par certains journalistes n’est donc pas un hasard. Tellement les situations sont inacceptables sur le continent et elles se prêtent aussi facilement à des chantages ou des ententes rentables en faveur des dirigeants africains. Du donnant donnant, l’honneur et l’éthique en moins.

Manifestement, c’est le coup de fric que les deux journalistes ont voulu réaliser avec le pouvoir royal marocain. Avec les redoutables services de renseignements marocains, le tout s’est transformé en un traquenard contre les journalistes Éric Laurent et Catherine Graciet, une plainte en bonne et due forme ayant été déposée à la police judiciaire française à Paris, une fois que la décision de piéger les journalistes avait été prise. Le tout est allé très vite par le truchement d’un avocat représentant les intérêts du Maroc dans une négociation rondement menée et bouclée en deux rencontres décisives dans un hôtel cossu de Paris.

La démocratie comme bouclier des dirigeants

Les enregistrements ont fait le reste. En convoquant l’oubli chez les deux journalistes, le dévoilement des enregistrements bouscule même le bon vieux principe de la présomption d’innocence : «Vous et madame Graciet, [êtes] disposés à renoncer à la publication de cet ouvrage, et de façon plus générale [que] les informations sensibles que vous avez, vous étiez disposés à prendre l’engagement de les oublier», raconte le JDD. A la demande de l’avocat du royaume chérifien, le journaliste Éric Laurent assure que sa coauteure Catherine Graciet est au courant de la démarche et du montant demandé pour leur faire oublier leur zèle.

«Je veux trois. - Trois quoi, trois mille ?, interroge l’avocat. - Non, trois millions. - Trois millions de dirhams ? - Non, trois millions d’euros». Les négociations auraient ramené le tout à deux millions d’euros. Un million chacun pour évider de diffuser des renseignements sensibles, arrêter la publication de livre, etc. Le jour J, seule la journaliste se montrerait un tout petit peu méfiante, surtout du téléphone cellulaire de l’avocat négociateur. Mais une avance de 40 000 euros à chaque journaliste fait tomber toutes les résistances. Les deux journalistes seront cueillis par la police judiciaire au sortir de la rencontre fatale.

L’avocat de Catherine Graciet, Me Eric Moutet, a confirmé vendredi soir l’existence d’un marchandage financier, dans un « contexte très troublant ». « Le royaume marocain a des comptes évidents à solder avec Catherine Graciet, et un nouveau livre sur l’entourage du roi est en préparation au moment où le marché financier se met en place », a-t-il déclaré. Pour lui, « Il y a dans cette affaire une logique de stratagème qui s’est mise en place », et « l’instruction devra déterminer le rôle de chacun » dans ce qui fait problème.

L’avocat d’Éric Laurent, William Bourdon, a ainsi reconnu l’existence d’un « accord financier ». Il a néanmoins réfuté tout chantage ou extorsion de fonds, dénonçant un « traquenard » et une « manipulation » des autorités marocaines, dénonçant une « opération politique » de Rabat contre deux journalistes critiques, « dont l'enquête est de nature à révéler de lourds secrets ». « Éric Laurent reconnaît et assume, pour des raisons qui tiennent à un contexte personnel difficile, avoir consenti à rechercher un accord financier dans des conditions totalement étrangères à un chantage ou une extorsion de fonds », a déclaré samedi son avocat, Me William Bourdon. Pour ce dernier, ce qui fait problème « c'est précisément l'avocat mandaté par le roi qui piège les journalistes par des enregistrements sauvages ».

C’est ça qui est ça! Et c’est bien là où conduisent les compromissions journalistiques. Pire encore, les chefs d’État africains mal élus sont devenus la cible de tous les escrocs politiques, sous tous les prétextes inimaginables : publicité, sécurité, élections, relations amoureuses, interview, etc. Pour tout cela, la démocratie et l’alternance, en conférant le bouclier des peuples aux dirigeants, demeurent les meilleurs remparts contre la manipulation et les traquenards des uns et des autres, des uns contre les autres. Vivement la démocratie.

Mot à Maux


Rédigé par psa le 30/08/2015 à 07:00



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