Profil
Pierre S. Adjété
Né à Lomé, PSA a fait ses études au Togo, au Gabon et au Canada. Économiste, administrateur et essayiste, PSA est un partisan assumé du «Grand Pardon» et un adepte de l’Éthique dans l’espace public; il est un acteur engagé dans des initiatives citoyennes et républicaines.
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Il y a un manque de rigueur chronique dans l’analyse des faits politiques au Togo. Pour être parti de ce pays assez tôt, peut-être, et tout en y gardant une forte présence, ce manque de rigueur m’a toujours frappé parce que teinté d’une animosité sans pareil qu’il est rare de voir chez d’autres peuples et intellectuels africains. Le rôle de l’intellectuel, fut-il togolais, est d’éclairer par sa capacité de manier les idées et les perspectives en décrivant la réalité, en l’explicitant au travers d’une grille de compréhension et si possible en proposant des pistes de solutions et de dépassement des situations problématiques.
Chez les Togolais, il s’est installé plutôt une partisannerie de peu d’effort, se limitant seulement aux insultes des prétendus bons sur certains des leurs, à jamais indexés comme des mauvais. Le manichéisme togolais s’est même élevé au rang de l’impensable : les démons et je veux bien dire de vrais démons d’un côté, les dieux et il faut bien comprendre des dieux vivants et intouchables de l’autre.
Sous des dehors idéologiques et de pure haine, les intellectuels togolais -pour certains de ces plus tardifs bavards au rang desquels vient de s’inscrire un Édoh Folly Dotsè se déclamant depuis Washington DC- la petitesse du raisonnement vient encore sonner le glas de cet intellectualisme louvoyeur professé au nom d’une toute petite idée de la démocratie, au nom de cette haine viscérale de l’autre, au nom d’un manque de jugement et de distance utile dans l’analyse, au nom d’une vendetta populiste qui ne veut pas s’arrêter du tout, même pas la veille d’une élection importante : les présidentielles togolaises. Pour respectable que puisse être notre ami Victor Komlan Alipui, dira-t-on qu’il vivait sur la lune dans des institutions comme la BCEAO ou le FMI et n’était pas au courant de la nature du régime Eyadema avant de venir travailler pour lui? Il se pourrait bien que oui –si nous nous accordons un moment de complaisance analytique, mais ceci est difficile à croire et à soutenir longtemps. Car, il n’existe pas d’institutions économiques et monétaires aussi politisés que le FMI et la BCEAO, nous le savons, pour peu que nous soyons à la hauteur du sujet, et quoi qu’en dit le ministre togolais des finances dans un des récents débats pré-électoraux. Apprenez-le une fois pour toutes les autres occasions : la politique n’est jamais bien loin de l’économique partout ailleurs, qu’il s’agisse de la Grèce endettée d’aujourd’hui que du Togo d’il y a vingt ans, lourdement déficitaire en démocratie. Dès lors, à lui monsieur Alipui -que M. Dotsè absout par un tour de main plumitif, comme à d’autres et à tout le monde d’ailleurs, doit alors s’appliquer la loi du retour de l’enfant prodigue, si tant est que la fréquentation du pouvoir Eyadema est à considérer comme un coupable égarement. Et, ils sont nombreux ceux et celles qui avaient fréquenté ce régime dont Gabriel Messan Agbéyomé Kodjo. Puis un jour, Agbéyomé Kodjo s’est ravisé pour s’éloigner du régime Eyadema. Cela fait partie de l’histoire politique récente du Togo, tout simplement un parcours de politicien. Agbéyomé Kodjo, probablement un des génies politiques que compte le Togo, toutes familles politiques confondues, a beaucoup plus légitimement et volontairement fait le saut hors du RPT et de son sérail que beaucoup trop de Togolaises et de Togolais n’avaient été contraints par un système de parti-État-unique, prévalant sur une partie du monde à l’époque, n’avait régenté le Togo, et pas seulement le Togo. Le Benin voisin qui a pourtant servi de modèle à l’amorce démocratique en milieu francophone africain, était même tombé plus bas que notre Togo natal dans ce système totalitaire de l’époque, le marxisme-léninisme en plus. Nous rentrons ici au cœur de la fausseté de certains intellectuels togolais, éveilleurs de conscience, éméchés et incapables d’articuler une analyse sans haine et sans jalousie. Normalement, il devrait nous être difficile de reprocher à quelqu’un sa fortune, s’il en possède et de quelque nature et niveau que ce soit. Il n’y a pas qu’au Togo que l’on fait fortune en politique; cela se fait et cela prévaut aussi bien au Togo, qu’au Bénin, au Gabon, au Ghana, au Canada, aux États-Unis et ailleurs, comme d’autres font fortune ou échouent carrément, par toutes sortes de manières, en menuiserie, en télécommunications, en consultation, en journalisme, en transport et autres, qu’ils soient dans ce même Togo ou en Égypte, au Brésil, en Espagne ou ailleurs au Burkina Faso. Et c’est d’une petitesse grave que de constater que l’un des tréteaux analytiques de M. Dotsè soit un chef d’accusation malicieusement fondé sur de vraies fausses considérations comme la fortune. Est-ce la pauvreté qui doit rendre plus éligible à la politique au Togo? Toute l’architecture argumentative développée par la suite par Édoh Folly Dotsè dégoulinant de haine devient boiteuse, racoleuse, tripoteuse et calamiteuse avant de s’effondrer piteusement par les suffisances d’un donneur de leçons de citoyenneté et de démocratie d’une cafouilleuse médiocrité, car tout simplement calomnieuse, diffamatoire et insatiable. Agbéyomé Kodjo qui ne connaissant manifestement pas bien l’âpreté du régime Eyadema et qui a pourtant avisé de ce qui se tramait en janvier 1993 avait-il plus tors que ceux qui connaissaient très bien le régime et n’avaient pas pris au sérieux sa mise en garde révélatrice du risque ou encore ceux-là même qui avaient tellement une connaissance du système qu’ils vont y sacrifier des centaines de jeunes en 2005 pour faire la preuve de leur grande compétence politique aux yeux du monde?
La médiocrité: un piège politique
Aussi longtemps que la simple réalité du dépassement, la responsabilité partagée, la mémoire déformante, l’incompétence politique, la division nord-sud, la haine et la jalousie prégnantes ne seront revisitées avec lucidité, nous assisterons toujours à ces déclarations intempestives qui resteront démesurément tributaires de la vulgarité analytique de ces mécènes politiques qui n’en n’ont pas du tout la stature. On dirait que chez certains Togolais, la médiocrité analytique, le silence sélectif, la parole insultante et la vendetta politique constitueront un éternel cache-misère intellectuel à n’en plus finir. Le Togo ne peut être candidat à la démocratie sans l’éveil de ses intellectuels. Les divers ratios de l’improvisation intellectuelle, de la radicalisation définitive et des jugements péremptoires (mangeoire, trahison, etc.) sur les réflexions de qualité et de grande étanchéité pour durer dans le temps sont beaucoup trop élevés et épousent une facile tendance à la continuité qu’il faut s’en inquiéter sérieusement. À la veille d’une élection présidentielle, c’est rien de moins qu’une dizaine de pages de verdâtre venin que le bien pensant Édoh Folly Dotsè trouvent à offrir à l’intelligence des siens, préoccupés et retenant leur souffle pour tous ces prochains jours. Il faut le faire! Il faut surtout s’attendre que certains ne se taisent pas devant une telle énormité avilissante et bassement gratuite. En quoi le pamphlet du sieur Dotsè éclaire peu ou prou les seules prochaines heures des élections et de l’après-élection au Togo. Observons. Il est de plus en plus rare et presque impossible de bénéficier d’une appréciation innovante des réalités politiques togolaises. Dans des directions différentes, Agbéyomé Kodjo n’était pas moins Togolais hier que Dossouvi Hilaire Logo –l’un des hommes du « 5 octobre », celui que j’avais surnommé DHL et ne peux plus désigner autrement sans me sentir bizarre moi-même, ne l’est aujourd’hui en travaillant avec Faure ou ne le sont, selon leur intime conviction, Lydia Adanlété, Djovi Gali, François Boko, Dahuku Péré, Amah Gnassingbé, etc. Les choix individuels façonnent l’histoire politique; ils ne la définissent pas sans la prise en compte des autres attributs importants qui sont loin d’être soldés au Togo. C’est de la normalité évolutive qu’une certaine fluidité existe et demeure dans les alliances politiques des partis et des acteurs. Rien de tout cela n’invalide le patriotisme ou la sagesse politique. Au contraire, cela relève de l’universalité politique et de son essence même, toutes aussi présentes au Togo qu’au Bénin par exemple; le premier pays végétant dans l’incohérence, le second pays expérimentant allégrement les bornes de variance de la démocratie après s’être invité à un pardon collectif et réparateur. La continuelle circularité du raisonnement analytique d’une certaine clientèle politique togolaise, toujours portée à désigner des coupables étrangers à sa propre incapacité, vaut bien cet arrêt pour relever l’inconsistance et la naïveté qui semblent conforter les uns et les autres dans ce qui devient comme une éprouvante caractéristique togolaise : des togolaiseries dont il faudra désormais se méfier. Je pensais ces togolaiseries passagères; elles deviennent persistantes et insidieuses au point de décourager les gens capables au profit des incapables. J’en veux pour preuve le sort que ces incapables avaient réservé à la DIASTODE, après leur coup d’État au président élu, réduisant la structure à une simple coquille vide, sans jamais être en mesure de la gérer avant d’être sauvée des eaux dernièrement par des déclarations de soutien usant d’un langage datant d’une autre époque. Sachons identifier dorénavant ces togolaiseries comme d’inacceptables situations qui constituent : un modèle de réflexions et de comportements structurellement et répétitivement partial, statique, redondant, déficient et inefficace pour ne pas permettre une évolution politique intégratrice de toutes les compétences humaines du Togo. Une sorte de vendetta politique, une Fatwa radicale prononcée et renouvelée constamment au nom d’une pureté citoyenne uniformiste qui ne possède aucun attribut républicain. Cette somme de médiocrité analytique, toujours haineuse et trompeuse, a-t-elle son siège à Washington DC ou sa demeure à Paris et ailleurs qu’elle mérite d’être confrontée à ses propres aberrations jusqu'à ce qu’un ajout de raisonnement moins primaire lui soit inoculé afin de la sauver de cette déficience et de cette inefficacité maladives. Il est normal que des gens ordinaires se basant sur le sens commun s’arrêtent trop longtemps sur des raisonnements primaires. Que des intellectuels s’y confortent et refusent d’emprunter l’escalier de la gradation analytique pour accéder à des niveaux supérieurs de conceptualisation et de compréhension du mal et de l’insuccès togolais relèvent non plus de la simple fourberie individuelle mais bien d’un amas de togolaiseries avilissantes desquelles nous devrions tous être moins fiers. Horizon
Rédigé par psa le 03/03/2010 à 00:03
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