Profil
Pierre S. Adjété
Né à Lomé, PSA a fait ses études au Togo, au Gabon et au Canada. Économiste, administrateur et essayiste, PSA est un partisan assumé du «Grand Pardon» et un adepte de l’Éthique dans l’espace public; il est un acteur engagé dans des initiatives citoyennes et républicaines.
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C'est fini. Elle ne sera pas la candidate du Parti démocrate à l'élection présidentielle américaine du 4 novembre. Elle ne l'a pas encore explicitement admis, mais elle le sait, et ses partisans le savent aussi. Qui l'eut cru, à l'automne 2007 ?
De tous les démocrates, elle avait été la première à se porter candidate. Elle savait la partie loin d'être gagnée. Une femme ? Une Clinton, en plus ? Personne n'avait été aussi méchamment attaqué qu'elle dans l'histoire récente américaine. Pas sur ses mœurs, comme son ex-président de mari, mais sur sa personne : sa rigidité, sa manie du secret, sa supposée "duplicité". Hillary, disait-on alors, avait deux atouts formidables : elle-même et son époux – la capacité de conviction de Bill, son flair, leur connaissance commune des entrelacs de la politique washingtonienne. Et elle avait deux gros handicaps : elle-même et son époux… Hillary élue, serait-ce le retour de Bill ? "Beaucoup de gens, expliquait Carl Bernstein, son dernier biographe, se demandent s'ils ont envie d'un nouveau psychodrame au sommet de l'Etat." Pourtant, sa candidature est vite apparue "évidente". Rien ne semblait l'ébranler. Exemple : le magazine dominical du New York Times sortait une enquête terrible, en juin 2007, intitulée "Les guerres d'Hillary". Pour résumer : elle a voté par conviction la guerre en Irak et, depuis que celle-ci est devenue impopulaire, elle brouille les pistes. Les auteurs listaient ses explications peu probantes, ses manœuvres visant à masquer cette réalité. Ces attaques semblaient glisser sur elle; parce que, notaient ses partisans, la plupart des démocrates se reconnaissaient en elle. N'avaient-ils pas, eux aussi, soutenu l'invasion de l'Irak avant que leurs yeux se dessillent ? En août 2007, elle menait la course avec 51% des intentions de vote. Ses concurrents ? Des nains : Barack Obama était à 21%, John Edwards à 15%, les autres n'existaient déjà plus. En novembre, à deux mois du début des primaires, elle devançait encore le jeune sénateur de l'Illinois de 21points. Elle avait réponse à tout : son programme était de loin le plus élaboré. Que s'est-il passé? Dans un premier temps, elle n'a pas perçu la "menace Obama". Malgré ses équipes de sondeurs aguerris, estime Dante Scala, professeur de sciences politiques à l'université du New Hampshire, elle n'a "pas vu l'aspiration au changement ni l'exaspération de la base démocrate et le désabusement de l'opinion vis-à-vis de l'administration Bush". "Changement", "espoir" étaient les mots d'ordre de son adversaire. (…) Plus la fracture s'élargissait au sein du camp démocrate, plus Mme Clinton était identifiée à sa propre base : blanche, pas métissée; style "vieille économie". Pas quelqu'un de tourné vers l'avenir. Elle écrasait M. Obama dans les Etats de la vieille industrie lourde et minière en déréliction. Il l'emportait largement dans l'Oregon, un Etat pas moins blanc, mais à l'économie "high tech". "Elle n'a pas compris que, sociologiquement, les démocrates avaient changé", juge M. Scala. Peu à peu, ses thèmes de campagne ont commencé à être battus en brèche. Elle fustigeait l'"inexpérience" de M. Obama. Quatre ans au Sénat : insuffisant, clamait-elle. Elle y a passé huit ans, plus huit à la Maison Blanche. En mars, Time publiait une enquête : "L'expérience compte-t-elle ?" Comme souvent, les lecteurs regardaient d'abord l'infographie. On y apprenait qu'Abraham Lincoln avait été élu président après deux ans seulement au Sénat. Beaucoup n'avaient pas eu auparavant une longue carrière de représentant, de sénateur ou de gouverneur : Woodrow Wilson : deux ans; Franklin Roosevelt : quatre… A la veille de l'élection du 1er juin à Porto Rico, en "une", le Wall Street Journal publiait une photo cruelle : Mme Clinton en campagne dans le Dakota du Sud. Derrière elle, sur l'estrade, un groupe d'hommes en rang d'oignons, tous blancs, visages fermés, lunettes et calvitie. Moyenne d'âge : 55-60ans. La caricature de son électorat. Une caricature injuste, au vu de sa carrière, de ses combats passés. Injuste car des jeunes se sont aussi mobilisés pour Hillary Clinton. Mais un cliché au fond peu surprenant, au vu de l'évolution de sa campagne. Sylvain Cypel, Correspondant New York, Le Monde Mot à Maux
Rédigé par psa le 04/06/2008 à 09:13
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