Profil
Pierre S. Adjété
Pierre S. Adjété
Né à Lomé, PSA a fait ses études au Togo, au Gabon et au Canada. Économiste, administrateur et essayiste, PSA est un partisan assumé du «Grand Pardon» et un adepte de l’Éthique dans l’espace public; il est un acteur engagé dans des initiatives citoyennes et républicaines.




Il semble que chez nous, au Togo, les perspectives d’un dialogue soient bloquées. Il semble qu’il en est ainsi parce que les uns ne veulent toujours pas reconnaitre l’élection des autres aux dernières présidentielles du 4 mars 2010. Sept mois plus tard, Faure Gnassingbé ne semble toujours pas comprendre la contestation à son pouvoir affichée par l’opposition au nom de « la vérité des urnes », pas plus que cette opposition ne veut rien céder parce que le pouvoir effectif demeure toujours entre les mains de Lomé 2 et ses voisinages. Ce seul fait –par sa nature même, traduit le peu de métier politique qui est caractéristique du Togo et de ses acteurs; au Togo, on se complait dans l’erreur et l’égo politique.


Gadea, Clair obscur, Opposition et Pouvoir
Gadea, Clair obscur, Opposition et Pouvoir
Il y a une métamorphose politique au Togo que les uns et les autres n’arrivent pas à percevoir.

Pour l’opposition togolaise incarnée par Jean-Pierre Fabre, Agbéyomé Kodjo et les autres un besoin d’unité reste indispensable, cette nécessité reste primordiale. Celle qui est offerte est davantage d’apparence unitaire puisqu’elle n’est toujours pas fondée sur l’avenir : le FRAC étant trop informel et sans projet. Il existe toujours un vide politique dans l’opposition qui se doit d’être rempli par le formel politique d’un véritable Mouvement politique citoyen –et le terme n’est nullement péjoratif dans le contexte togolais et sa consécration a véritablement pris naissance au Canada en transcendant les clivages, en rassemblant les Togolaises et les Togolais sans aucune considération partisane ni ethnique pour une célébration de la fête nationale en avril 2008.

Des citoyens togolais s’organisant puis fêtant avec l’ambassade du Togo, la chose fut assez rare, audacieuse mais surtout respectueuse des uns et des autres par des déclarations écrites claires et motivées qu’elle a suscité la participation de la majorité des Togolais et surtout –excusez du peu, faire taire les éternelles critiques. Pour l’opposition togolaise, il s’agit donc de supporter sa présence nouvelle par un Mouvement politique citoyen convergent qui n’altérerait pas les partis politiques ou les entités encore en action.

La démocratie a besoin d’une opposition véritable mieux organisée, bien structurée et porteuse d’un projet de société indépendamment de qui est en face d’elle, indépendamment de qui gouverne le Togo. Six mois déjà après les élections, il est grandement temps que les officines des partis ou groupes de l’opposition sortent un projet autre que les marches et les prières hebdomadaires. Les marches et les prières furent indispensables. Interdites et réprimées, même de manière illégale, elles deviennent peu propices à incarner une volonté politique d’une entité désireuse de gouverner un pays. Quel projet politique l’opposition togolaise est capable de tracer et d’offrir ? Nul ne saurait le dire. Ce qui constitue l’opposition politique aujourd’hui, ceux qui forment l’opposition politique au Togo n’ont aucune tradition de proposition d’un projet politique viable. Héritiers d’une pratique politique restée seulement contestataire, c’est pratiquement une autre violence qu’ils doivent se faire pour inventer un avenir à proposer; et l’avenir du Togo c’était depuis hier, c’est dire que c’est un avenir urgent.

À l’avantage de cette opposition active qu’incarne Jean-Pierre Fabre, il y a cet atout de la présence d’un certain Agbéyomé Kodjo, redoutable animal politique et disposant des moyens humains bien au-delà des capacités de tous ses partenaires. Un tel capital d’habilité doit s’investir à fond dans l’opposition et y apporter ce qui a toujours manqué à ce groupe : la force des idées et des stratégies, la visée de l’avenir. En somme, de nouveau, l’opposition togolaise se doit de s’unir autour d’une structure formellement viable qui n’éteigne pas forcément les partis politiques; ce qui existe aujourd’hui est nettement insuffisant, très embryonnaire pour être crédible et respectable. Tant il est vrai que le départ de Gilchrist Olympio crée l’illusion d’une place à prendre chez certains chefs de partis politiques ; cette illusion doit se dissiper pour une unité d’action autour de Jean-Pierre Fabre et Agbéyomé Kodjo. Le Togo a besoin d’une opposition politique réelle et novatrice. Parce que le Togo a changé et les citoyens attendent autre chose de leur opposition, le monde entier attend autre chose d’une opposition politique.

Qu’en est-il du pouvoir présidentiel au Togo?

La situation de Faure Gnassingbé n’est toujours pas lisible clairement, tout simplement parce qu’il n’est pas clair lui-même. Faure est le produit d’une vieille école politique qui ne sait véritablement pas comment changer le Togo. Cinq ans durant, il a tâtonné au lieu d’agir avec comme résultat final une prise politique qui n’en est pas une véritablement -puisqu’il s’agit de Gilchrist Olympio, une répétition de la violence envers les citoyens qui contestent son pouvoir, un regain de l’ethnocentrisme au Togo. La faiblesse de Faure est de toujours penser que son pouvoir ne doit pas être contesté. C’est le propre de tout pouvoir d’être contesté, d’une manière ou d’une autre, de Paris à Washington DC, en passant par Berlin, Cotonou, Montréal et autres. Tout le monde ne sera pas un Nelson Mandela ou encore un Lula…

Le pouvoir de Faure sera moins contesté dès l’instant où les uns et les autres sauront qu’il innove politiquement. Innover au Togo c’est parler à ses adversaires même en l’état actuel des choses. Il est peut-être temps aussi de dire que Faure Gnassingbé est mal conseillé : un chef d’État ne peut pas écouter que des gens qui pensent de la même façon que lui; un chef d’État n’écoute pas que les mêmes personnes depuis toujours… Il n’a tout simplement pas le droit. Il semble que Faure n’appelle pas Jean-Pierre parce que celui-ci dit toujours ne pas le reconnaitre…

Entamer une conversation n’a nullement besoin d’une autre reconnaissance aussi patente. Lula fait la vaisselle avec ses concitoyens en fin de semaine, il est immensément populaire et sans aucune démagogie, puisque son résultat politique est époustouflant car il sait penser, dire et faire au-delà des sentiers déjà battus. Faure est-il capable d’engager une conversation avec ses adversaires? La question de reconnaissance est même secondaire, très secondaire en diplomatie, une fois qu’un dialogue politique est noué. On ne dirait pas que l’on est dans un pays qui a donné naissance à un des plus grands diplomates africains, Edem Kodjo pour ne pas le nommer. Pour ce qui est de la force toujours en usage au Togo, pour ce qui est de l’ethnocentrisme toujours alimenté diversement, point n’est besoin de s’attarder là-dessus; ils témoignent de la poursuite des errements politiques qui n’ont plus leur raison d’être. Le pouvoir togolais doit sortir de ce piège de la violence et de l’ethnicité aiguë du pays.

Encore une fois, le changement est possible au Togo. Ce changement réside avant tout dans l’audace et la bonne foi des tenants du pouvoir. Faure Gnassingbé en particulier doit assumer le Togo autrement en débloquant le pays dans la bonne foi et avec une audace particulièrement notable et lisible de partout. Normalement, changer véritablement le Togo doit être le mandat à donner à un prochain Premier ministre –je n’ai rien contre celui-ci, mais il a donné ce qu’il peut donner et a l’air bien fatigué à son passage caché à Montréal la semaine dernière, après New York. Très sérieusement, il serait sain qu’un autre Premier ministre soit appelé avec pour mission de débloquer le Togo. Parce que ce pays s’est bien métamorphosé, et il faut le saisir véritablement là où il se situe. Le reste, tout le reste, des postes promis aux AGO jusqu’aux tentatives de reporter des élections à la Fédération togolaise de football (FTF), tout ça c’est de la toute petite politique dont le pays n’a pas besoin. Les uns et les autres doivent prendre les moyens de débloquer le Togo. Véritablement, il y a vingt ans que ce pays est bloqué; il est temps de le sortir de l’erreur en diminuant les égos et en faisant preuve d’imagination. Probablement que le premier qui fera preuve de cette audace politique véritablement éthique en récolterait des gains inestimables.





Diplomatie Publique


Rédigé par psa le 03/10/2010 à 19:19
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Le Brésil est devenu un pays crédible et stable sur le plan économique. Il y a plus de soixante-dix ans, le grand écrivain et voyageur Stefan Zweig, désespéré par le cataclysme de la guerre en Europe, rejoint le Brésil, le «pays du futur», écrit-il. Avant lui, beaucoup ont rêvé de ses ressources quasi infinies et même inventé l’utopie d’un nouveau monde à bâtir. Beaucoup en sont revenus ruinés, brisés par des crises politiques et financières à répétition. Que de décennies perdues alors que tout semblait possible, si proche d’éclore… Arrive Lula


Lula comme Lumière… Brésil comme rêve éveillé
Ce dimanche, les élections brésiliennes seront témoins d’un enjeu interne et d’un accomplissement de portée planétaire. Au plan intérieur, sauf surprise, Dilma Rousseff -la baptisée DilmaLula, succédera à Luiz Inacio da Silva, dit Lula, un héros du bas peuple, proche du mythe, qui se retire avec une cote de popularité stupéfiante: 80%. Pour le reste du monde, les années Lula marquent l’arrimage d’un géant dans le cercle des grandes puissances et des pays crédibles.

L’événement est considérable. C’est une bonne nouvelle et l’espoir pour tant d’autres régions du globe. Car il y a huit ans tout juste, le Brésil, ce pays-continent de près de 200 millions d’habitants, n’était encore qu’un convalescent fragile, qui se remettait difficilement de l’inflation galopante et de crises monétaires destructrices. Le prédécesseur de Lula avait fait deux promesses: rétablir la crédibilité financière du Brésil et lutter contre la pauvreté endémique, cette honte d’une croissance qui naît, s’affirme, puis se casse aussitôt en deux.


DilmaLuladasilva
DilmaLuladasilva
À l’arrivée au pouvoir de Lula, les altermondialistes rêvent d’un grand soir, d’une autre politique, résolument anticapitaliste. Il les entend mais, comme de Gaulle en Algérie, il contourne les querelles idéologiques et se montre un redoutable pragmatique. Son gouvernement approfondit les réformes économiques orthodoxes et accélère les programmes d’aide sociale. La monnaie, le real, tient le choc, les taux d’intérêt baissent, les capitaux répondent à l’appel. Lula obtient assez vite la grâce, puis la confiance de ceux qui le redoutaient. L’ouvrier au pouvoir répond tout aussi rapidement aux attentes des plus faibles; il systématise la Bolsa familia (Bourse Famille), ses aides aux familles les plus pauvres. Le bilan d’ensemble force le respect. Près de trente millions de foyers sont entrés dans la classe moyenne. Le Brésil, que la demande en matières premières a réveillé au bon moment, peut enfin compter sur les fruits de la redistribution vertueuse; le marché intérieur s’envole. Une classe moyenne, enfin, existe et prospère. La 8e économie du monde croît à un rythme régulier de 3 à 5% et permet à l’ancien assisté non seulement de rembourser ses dettes, mais de prêter sa fortune au Fonds monétaire mondial. La menace d’une rechute semble improbable

Le Brésil vit un rêve éveillé. Les superlatifs manquent pour décrire la relation fusionnelle qu’entretiennent les Brésiliens avec leur président Lula. A tel point que l’on se demande si le pays saura se passer de lui. Dilma Rousseff, qui lui succédera en janvier 2011, s’emploiera certes à poursuivre l’œuvre de son mentor, mais sans soulever l’enthousiasme. Sur le plan économique, là où on ne l’attendait pas, il est excellent. Au regard de son passé de dirigeant syndical pendant la dictature militaire et de fondateur du Parti des travailleurs (PT), trois fois candidat malheureux à l’élection présidentielle (1989, 1994, 1998), Luiz Inacio da Silva, dit Lula, se présente aux élections de 2002 avec un discours modéré, instruit par ses défaites. Ses emportements passés contre les politiques d’ajustement l’ayant desservi, il cherche à inspirer confiance.

Ministra da Casa-Civil
Ministra da Casa-Civil
La lettre au peuple brésilien du 22 juin 2002 donne le ton: «Le PT et ses partenaires ont conscience que le dépassement du modèle actuel ne se fera pas par un tour de magie»; «Une transition lucide et prudente sera nécessaire»; «Une condition de cette transition sera le respect des contrats et engagements du pays»; «La stabilité, la maîtrise des finances publiques et de l’inflation constituent un patrimoine de tous les Brésiliens.» Le PT entre dans l’ère du pragmatisme et tourne le dos à la recherche d’une alternative au néolibéralisme. Depuis, le tout marche : Le Brésil est devenu un pays crédible et stable sur le plan économique. Marlene et Marcos Antonio font partie de ces 29 millions de Brésiliens qui ont accédé à la classe moyenne depuis l’arrivée au pouvoir de Lula en 2003. Ce sont les conclusions d’une étude de la très respectée Fondation Getulio-Vargas (FGV), basée sur les chiffres de l’Institut brésilien de géographie et de statistiques. Cette fameuse moyenne compte désormais près de 95 millions de personnes, soit un Brésilien sur deux (52%). Une avancée majeure. C’est l’accomplissement d’un homme qui change le monde en deux mandats constitutionnels. La politique reste l’art du possible./////////Pierre Veya, Olivier Dabène et Frédéric Louault

Ad Valorem


Rédigé par psa le 02/10/2010 à 02:02
Tags : Brésil Dilma Rousseff Lula Notez



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