Aucune communion ne peut plus être donnée au pouvoir sans confession
On comprend surtout les propositions audacieuses du chef de file de l’opposition togolaise à l’adresse de celle qui, elle-même en 1998, n’a jamais cru bon rendre compte au peuple togolais de sa démission rocambolesque de la Commission nationale électorale au lendemain des présidentielles de 1998, en plus de n’avoir jamais cru devoir faire des dépositions devant la modeste CVJR présidée par monseigneur Nicodème Barrigah. Et Jean-Pierre Fabre de préciser abondamment à Mme la présidente Awa Nana-Daboya : « Au regard de toutes les considérations qui précèdent, votre démarche ne peut que susciter la plus grande suspicion. En tout état de cause, le HCRRUN et sa Présidente sont disqualifiés pour traiter un sujet aussi sensible que les réformes politiques. En conséquence, je vous demande d’annuler purement et simplement la tenue de cet atelier que je considère comme une mise en scène grotesque visant à créer les conditions d’un enterrement de l’APG ainsi que des réformes convenues. Puisque vous sollicitez mes conseils, je me permets de vous suggérer d’inviter le gouvernement et sa majorité parlementaire à soutenir et à faire aboutir favorablement, la proposition de loi de révision constitutionnelle, relative aux réformes politiques prescrites par l’APG, que des députés viennent d’introduire à l’Assemblée nationale. » Et voilà comment le HCRRUN est considéré avec raison comme une diversion dans le paysage politique togolais.
Désormais, la réalité togolaise doit être abordée avec lucidité, réalisme et tempérance certes, mais toujours avec une fidèle vérité, une rigueur conforme aux faits et une exigence de responsabilité hors de toute complaisance coupable. Le problème togolais doit être pris à bras le corps. Et, si la solution doit venir de tous les acteurs, il est tout aussi clair que le pouvoir togolais, nommément Faure Gnassingbé, doit changer son fusil d’épaule, si tant est qu’il lui faudra encore un fusil au lieu d’un numéro de téléphone : celui du chef de file de l’opposition togolaise, Jean-Pierre Fabre, un numéro de téléphone qu’il connaît parfaitement d’ailleurs.
Aussi, si reprise de dialogue il doit y avoir au Togo, cette étape ne serait pas franchie sans que Faure Gnassingbé lui-même ne soit à la table de négociation, pour tout le temps que cela va durer. Finis donc ces rencontres où les délégués du pouvoir togolais, ne disposant en réalité d’aucun mandat à s’engager, finissent d’ailleurs par faire du simple présentéisme en refusant même de parler parfois. Tous ces dialogues silencieux sont finis. Fini, la moquerie politique permanente au Togo. Finis cette désinvolture et cette incompétence qui fait qu’un chef d’État n’a jamais été un modèle républicain en quoi que ce soit dans son pays où à l’extérieur.
Plus d’une décennie de présence à la tête du Togo –sans rire à défaut d’en pleurer, personne ne peut dire, véritablement, ce que Faure Gnassingbé fait exactement de sa fonction à part de se promener à travers le monde, en enchaînant visites et conférences, en évitant soigneusement les Togolaises et les Togolais de la diaspora qui pouvaient ne pas lui laisser la conscience tranquille partout où il passe. Le chef de l’État togolais trouvera donc le temps pour gagner un peu de crédibilité, en s’offrant l’occasion de s’asseoir avec celui ou ceux de ses adversaires qui comptent véritablement et, ainsi, passer le Togo à autre chose.
Le problème togolais est véritablement Faure Gnassingbé plutôt qu’une quelconque opposition togolaise décidée, avec si peu de moyens, à mettre fin à l’indignité douloureuse servie à tout un peuple, du Nord au Sud, et pour si longtemps. À quand cette promesse de réconciliation faite à toutes les chancelleries du monde que lui-même Faure Essozimna Gnassingbé, fils de son père du Nord et de sa mère du Sud, était la personne la mieux placée pour solder les comptes douloureux du passé togolais, et mieux projeter le Togo dans une ère nouvelle de démocratie? À quand cette promesse faite aux Togolaises et Togolais que plus personne ne serait sacrifié avant l’avènement de la démocratie au Togo? Attendrons-nous longtemps encore pour toutes ces promesses livrables en 2005-2006? Franchement, à d’autres.