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Pierre S. Adjété
Pierre S. Adjété
Né à Lomé, PSA a fait ses études au Togo, au Gabon et au Canada. Économiste, administrateur et essayiste, PSA est un partisan assumé du «Grand Pardon» et un adepte de l’Éthique dans l’espace public; il est un acteur engagé dans des initiatives citoyennes et républicaines.




Toujours au bon moment, l’histoire des peuples sait presser le pas pour rattraper le temps perdu. Alors, à cette occasion-là, « la seule chose dont il faut avoir peur est la peur elle-même ». Le Togo presse ses pas vers l’échéance du 20 décembre 2018. Avec audace, avec ambition, avec exigence, un tout nouveau contrat citoyen est en rédaction au Togo. L’objectif est clair : un autre Togo doit naître à la place de l’invouloir du régime autoritaire.


Sortir le Togo de l'Invouloir

Particulièrement fourbe et dernier élève de la promotion démocratie de la CEDEAO, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest, le Togo des cinquante dernières années est resté insensible aux vertus de l’alternance politique. Le réveil à la réalité démocratique est ainsi brutal et embarrassant pour le pouvoir présidentiel, devenu très discret contrairement à ses habitudes. Rien n’est joué, mais la CEDEAO semble avoir appuyé là, ici, partout où ça fait mal au régime togolais. Le récalcitrant Togo est en punition devant toute la classe CEDEAO.

En guise de blague, et pour détendre une atmosphère accablante et gênante, la formule circule sur les réseaux sociaux comme le résultat d’une consigne donnée par une maîtresse d’école : « le Togo est calme, on dirait que la CEDEAO écrit les noms des bavards ». Nous sommes bien les premiers jours après la fameuse Feuille de route de la CEDEAO, et les dignitaires du régime sont introuvables pour faire des commentaires publics. D’autant plus que, par une entourloupette dont les officiels du pouvoir togolais possèdent encore le secret et l’indignité, un vrai faux Communiqué final de la CEDEAO a été publié pour masquer le désarroi de la partie présidentielle.

La démocratie est une longue marche, surtout si l’on ne l’a pas commencé tôt. Il semble bien que la démocratie soit bien vivante, les femmes et les hommes du Togo n’y ayant jamais renoncé. Mais cette bête qui garde son souffle et remue sa queue a besoin d’être nourrie par un engagement conséquent des citoyens, aussi bien à l’intérieur du Togo qu’à l’extérieur. Au Togo, #PourLeTogo, la démocratie est devant. Ni à gauche ni à droite, la quête de démocratie, à ce tournant particulier, exige une discipline à toute épreuve, un pur sérieux politique.

Sortir le Togo de l'Invouloir


La rigueur de la #C14 fait toute la différence

La diaspora togolaise d’abord… l’instinct Togo toujours vivant doit ramener à l’essentiel : une soif énorme de liberté, une fierté convertible en actes, un ralliement autour de la reconquête de l’Assemblée nationale par la Coalition des partis de l’Opposition républicaine, la #C14. C’est un objectif clair, unique et sans équivoque que doit épouser la diaspora. À l’échéance prescrite, l’Assemblée nationale doit être conquise avec l’aide et toute la force de solidarité de la diaspora togolaise. Le vent du changement doit souffler de l’extérieur vers l’intérieur du Togo.

Comme un Anglais à New York, la diaspora togolaise est aussi devenue une étrangère légale, chez elle, au Togo. Comme une « Servante écarlate », la diaspora togolaise qui n’a de son pays que le souvenir du « bon vieux temps », a fini par porter tout le Togo, de gré ou de force, et en a assuré la reproduction. Cette diaspora doit confirmer, une fois de plus, son soutien à la #C14 qui reste le porte-voix principal d’un destin si collectivement exprimé.

« L’air de s’observer et de ne vouloir rien lâcher », la #C14 a été au centre de toutes les spéculations en devenant l’entité que certains aimaient détester le plus. La fermeté autant que la flexibilité a tenu ce groupe ensemble contre vents et marées : vents externes venant du large présidentiel comme une torpille et marées d’incompréhensions internes. Porte-étendard de l’Opposition, la #C14 a su faire de la place aux autres entités de la société civile, au point d’acquérir la salutaire reconnaissance de la CEDEAO comme partie prenante légitime à la solution de la crise togolaise.

Comment réunir nos capacités autour de cette #C14 pour parcourir les étapes restantes? Nous n’avons de choix que d’utiliser ce canal pour contenir la bouillonnante démocratie dans son éveil redoutablement programmé par la CEDEAO. À travers nos ambitions personnelles, c’est couramment que nous restons égotistes. Lorsqu’en tant que collectivité nous voulons réaliser des progrès significatifs, il nous est fortement recommandé d’agir comme un Peuple sous un leadership commun. La leçon apprise des avancées notables de l’histoire humaine est désormais inscrite dans la Feuille de route offerte aux femmes et aux hommes du Togo… Ce pays doit sortir de l’invouloir. Le Togo doit changer.


Ad Valorem


Rédigé par psa le 07/08/2018 à 00:00



Ici, il ne faut nullement cacher notre sympathie à donner une main secourable à Kako Nubukpo et, de l’autre main, lui faire une tape dans le dos. Face à deux chefs d’État africains, qui s’y sont mis d’ailleurs à deux, pour obtenir sous de probables menaces, les excuses d’un simple citoyen dans l’euphorie d’une conférence universitaire survoltée, notre choix est clair : des excuses sous contrainte obtenues du professeur Kako Nubukpo sont une pure faiblesse de Faure Gnassingbé du Togo et Alassane Dramane Ouattara de la Côte d’Ivoire. Et, voici pourquoi qui avait déjà péché ne peut jeter la pierre à Kako Nubukpo.


L’histoire du monde est la chronique des dissidences…
L’histoire du monde est la chronique des dissidences…


À Londres, à la Cathédrale St-Paul, gît les restes de l’architecte ennobli, Sir Christopher Wren. Sur la tombe de Chris Wren, tout visiteur peut encore lire la mention mise par son fils : « Lecteur, si vous cherchez son œuvre, regardez autour de vous » [“Lector, si monumentum requiris circumspice” (Reader, if you seek his monument look around you)]. Personne ne peut oublier que ce bâtisseur impénitent de Londres, pour extérioriser ses talents, avait aussi quelques accointances, sinusoïdales, avec la royauté.

L’histoire de Chris Wren est surtout édifiante aujourd’hui, car Kako Nubukpo y puise quelques 350 ans plus tard, la valeur réelle de ses excuses présentées aux présidents togolais et ivoirien. Sous les virulentes critiques des journaux de l’époque qui avaient conclu, ex cathedra, qu’un dôme construit par Chris Wren devrait immanquablement s’effondrer un jour prochain sur les citoyens, l’architecte accepta de faire construire une colonne pour soutenir le dôme, éviter une éventuelle catastrophe et surtout faire taire les critiques virulentes dans une période où la « Déclaration d’indulgence » était pourtant promulguée par Charles XI.

À cette époque où tout architecte surveillait lui-même ses travaux, Christopher Wren fit construire une colonne qu’il prit soin d’arrêter à quelques centimètres, avant qu’elle ne touchât le dôme. Du bas, personne ne constata la supercherie. Mais les critiques, triomphantes, se glosèrent puis se turent. Évidemment, le pot aux roses fut découvert quelques années plus tard; radio Kankan fonctionnant aussi bien à Londres qu’à Lomé, Abidjan ou ailleurs. Et notre ami Chris de répondre comme si c’était notre ami Kako qui parlait aujourd’hui : J’ai élevé cette colonne pour taire les critiques et préserver l’essentiel. J’ai élevé cette colonne, non pas pour préserver le dôme d’un quelconque effondrement, mais bien pour supporter mes propres convictions que la structure du dôme est solide et traversera les années; ce qui est le cas jusqu’à aujourd’hui. Ensemencée, la vérité toujours grandit.


Un excès d’excuses forcées est rédemption

Que nous soyons de passage à Paris ou à Londres, n’oublions pas d’aller prendre un café avec Kako Nubukpo à la Francophonie, ou tirer chapeau à Chris Wren dans le Vieux Londres et sa Cathédrale St-Paul. Naturellement, il vous serait impossible de rencontrer Faure Gnassingbé à Lomé ou Alassane Dramane Ouattara (ADO) à Abidjan. Et c’est ici qu’il nous est devoir de leur mentionner qu’ils n’avaient aucunement besoin de chercher à humilier Kako Nubukpo en exigeant de lui un excès d’excuses, au lieu de lui servir un coup de fil inattendu. Comme il sait souvent le dire, « Tu ne nous as pas raté, petit Frère » aurait pu dire ADO à Kako. Ce dernier devrait, lui-même, se confondre en mille et humbles excuses qui lui resteront mémorables et instructifs.

Kako Nubukpo fait très bien le travail que devraient d’ailleurs faire tous les Faure Gnassingbé et les Alassane Dramane Ouattara des pays francophones africains qui ont le franc CFA en partage : faire évoluer les conditions de couverture, d’émission et de gestion de cette monnaie unique, et rendre compte. Avant Kako Nubukpo, d’éminents économistes africains dont l’équipe Édem Kodjo, alors ministre des Finances, avaient fait évoluer les conditionnalités du franc CFA. C’est dans cette droite lignée que se situe Kako Nubukpo qui fait l’admiration de toute une jeunesse africaine, les maladresses humaines et circonstancielles en moins.

Un chef d’État n’est pas une personne normale –nous en savons quelque chose pour en avoir expérimenté et éconduit un de beaucoup trop normal. Les populations que dirigent les présidents africains n’ont pas besoin de preuves toujours irréfutables, le fameux fusil tout chaud et tout fumant (Smoking Gun), pour affubler leurs dirigeants. Leurs gestes, leurs propos, leurs inactions et indécision, parlent largement pour ces chefs d’État, que les populations africaines savent bien les situer, les accuser au besoin, les appeler à leurs devoirs les plus sacrés : être à l’écoute de leurs concitoyens et se garder de n’en humilier aucun, malicieusement.

Les excuses privées de Kako Nubukpo étaient largement suffisantes dans les circonstances, comme est de trop le Communiqué de presse et autres pressions indues déversées sur un si rare messager d’une jeunesse africaine en ébullition. À Kako Nubukpo, dans toute son imperfection humaine passagère, nous rappelons bien ces propos uniques de l’un des missionnaires de l’impossible, le dissident Martin Luther King, Jr. : la souffrance imméritée est rédemptrice (Unearned suffering is redemptive).

Kako Nubukpo, levez-vous! Allez partout et continuez à semer la Bonne Nouvelle; tout est changement, tout est évolution, le franc CFA aussi. Les talents ne se taisent point; pas plus qu’on ne les fait taire. Mieux vaut savoir les gérer dans l’espace qu’ils se créent et recréent. Dans cette Afrique en quête d’exemples et de dignité, Kako Nubukpo, vous avez espace et bons vents. Courage!



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