La succession des épisodes de crises et de ridicules politiques –formation du gouvernement, organisation d’une inutile cérémonie d’investiture présidentielle, état de santé de Faure Gnassingbé, déclaration farfelue et injurieuse de l’ambassadeur de l’Allemagne au Togo, la cacophonie de la célébration impromptue des martyrs (quels martyrs finalement?) et bien d’autres situations corsées et carrément loufoques comme celle du représentant spécial du secrétaire général de l’ONU pour l’Afrique de l’Ouest au lendemain des présidentielles, un Mohammed Ibn Chambas incapable de dignité, sans oublier le fameux expert électoral Clément Aganahi, davantage plaisantin que démocrate, et son système dénommé « succès », tout cela témoigne bien de la déliquescence avancée qui prévaut dans les mœurs publiques au Togo et qui attirent autant de charognards politiques.
Véritablement, les deux mandats présidentiels de Faure Gnassingbé n’ont servi qu’à confirmer une impréparation assidue, une vaste corruption politique à ciel ouvert ainsi qu’une carence irrévérencieuse à faire évoluer le Togo, contrairement à ses propres promesses de réconciliation et de développement en plus de n’avoir jamais été l’élu de ses concitoyens.
Une fois encore et toujours maladroitement, Faure Gnassingbé expose l’impératif éthique qui s’impose désormais au Togo : il faut du caractère, de la volonté, de la ténacité et du métier pour sortir le Togo de son impasse et retourner le pays à sa vocation démocratique. Il n’y a plus de doute que le Togo est entré dans une ère de survie politique. La tergiversation ambiante et le choix peu risqué du premier ministre Edmond Sélom Klassou laissent les roues libres à Faure Gnassingbé pour faire face à ses vieux démons : son éternelle indécision ainsi que la tentation de l’impossible rapprochement avec son seul et redoutable adversaire que demeure Jean-Pierre Fabre. La situation qui prévaut au Togo atteste bien que le pays est livré en pâture à une bande difforme et tentaculaire sans aucune retenue.
Pour avoir usé constamment de la manipulation envers tous ses vis-à-vis, dont des chefs d’État étrangers et, comme son père Gnassingbé Eyadema au soir de sa vie lorsque celui-ci n’avait que la subversion comme gouvernance, l’isolement comme refuge et la solitude comme naufrage, Faure Gnassingbé reçoit à son tour le désaveu du changement tronqué, l’impermanence et même la fragilité du pouvoir absolu. La faiblesse de Faure Gnassingbé est désormais réelle autant que sa posture inconfortable est observable de partout et sous tous les angles. Une bataille perdue et volée, en plus d’être connue du monde entier est toujours difficile à concélébrer avec ses pairs et ses compatriotes. Le Togo doit être restitué à la sagesse des termes et des conditions de la réconciliation et du Grand Pardon si longtemps prônés. C’est écrit et enseigné partout dans l’espace public : « Tu n’iras pas plus loin, ici s’arrêtera l’orgueil de tes flots! »
La répression constante du peuple n’est pas une solution à la démocratie
Il est clair. Pour la large majorité de ses citoyens de l’intérieur et de l’extérieur, le Togo actuel est inacceptable, totalement indigne, inconcevable et, plus que quiconque, Faure Gnassingbé en est le responsable. Mieux vaut tôt que tard. Faure Gnassingbé doit se convertir à la démocratie, accepter de quitter le pouvoir dans des conditions courageuses qui le feront porter en triomphe par les Togolais eux-mêmes et ainsi lui conférer la garantie populaire autant que le respect institutionnel comme ce fut le cas en Argentine, au Bénin et ailleurs où le totalitarisme s’est transmuté en salutaire démocratie. La capacité de répression du peuple togolais par les forces de sécurité ne peut donc constituer une autre option à la démocratie; c’est aussi en cela que le pouvoir absolu est impermanent. La liberté ne fatigue pas les peuples; ils poursuivent toujours leur lutte émancipatrice jusqu’à la victoire finale.
Ainsi, la bataille pour la démocratie au Togo se doit d’être livrée par tous les citoyens du Togo, le courage de Faure Gnassingbé y compris, davantage que sa peur des uns et des autres qui essaiment tout autour de lui et plombent son propre salut et celui de sa famille tout autant que le destin, la dignité et l’envol de tout le peuple togolais. L’heure est grave. Le désenchantement des citoyens togolais est le meilleur argument quant à l’échec d’un système totalitaire qui ne peut plus tromper personne à quelques niveaux que ce soient; un système dont les courtisans seuls, internes et externes, savent vanter les avantages, les leurs, sonnants et trébuchants, insolents et impertinents.
Désormais, chacun connaît ses responsabilités quant au devoir du changement politique au Togo. Le renoncement, le déni, encore moins le dénigrement, les menteries et les propagandes n’ont réussi à convertir la réalité togolaise à autre chose que l’imposture et l’insatisfaction généralisée dont les dernières élections présidentielles d’avril 2015 constituent le parfait exemple. Et, parlant d’élections, le réveil démocratique tardif de Faure Gnassingbé ne doit aucunement compromettre la participation de l’opposition responsable à tous les rendez-vous électoraux à venir. En aucune circonstance, il n’est plus question du boycottage électoral au Togo; que des élections soient organisées sous le sceau de la fraude, de la précipitation ou de l’irrespect des citoyens au travers des résultats connus d’avance, qu’importe. C’est la corde du ridicule que ce régime impropre fournira lui-même, que les démocrates togolais utiliseront, raisonnablement, pour venir à bout d’un système aussi livide. L’absurdité de la situation politique au Togo exige la participation à toute élection, même frauduleusement organisée, et le moindre gain ne sera que la réaffirmation du désir obstiné du devoir de changement politique au Togo.
Invariablement, l’opposition togolaise ne constitue pas le problème du Togo. Et tous ceux qui comprennent cette évidence minimale doivent savoir dans quelle direction tourner leurs inflexions. Soudain seuls avec une autre victoire électorale volée au peuple togolais, Faure Gnassingbé et ses affidés quant à eux redécouvrent la fiction de leur entêtement à creuser des sillons politiques vers le changement véritable avec de simples lames de rasoir, en acrobatie et en contorsions diverses. Ils sont seuls à tailler des arbres de la forêt politique togolaise avec de rudimentaires canifs datant de l’époque du père Gnassingbé Eyadema, cinquante ans déjà. Une tragi-comédie qui sème l’embarras chez tous les citoyens du Togo. Et pourtant. Hors la démocratie, point de salut ni de repos politique au Togo. Autant en apportent toujours tous les vents du changement duquel le Togo ne saurait trop longtemps se cacher. La démocratie est libératrice des enthousiasmes et des forces du progrès socio-économique et de la dignité humaine; les citoyens du Togo ne renonceront donc pas à la démocratie et à l’alternance.