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Pierre S. Adjété
Pierre S. Adjété
Né à Lomé, PSA a fait ses études au Togo, au Gabon et au Canada. Économiste, administrateur et essayiste, PSA est un partisan assumé du «Grand Pardon» et un adepte de l’Éthique dans l’espace public; il est un acteur engagé dans des initiatives citoyennes et républicaines.




La table est bien mise pour des élections contestables en Guinée. L’ère post-Conté qui devrait porter l’espoir d’un réel changement dans la gouverne publique et aider à l’émergence d’un vivre-ensemble démocratique -quoique déjà tronquée par Moussa Dadis Camara, ne semble pas avoir été suffisamment remise sur les rails afin d’éviter les contestations dommageables et incertaines de la phase électorale ultime. Le décompte d’une semaine brumeuse vient de commencer réellement.


Quels lendemains électoraux à la Guinée ?
Il y a une blague qui circule dans le cercle des chefs d’État africains; elle est simple : « Tu vas faire des élections? Attends-toi à ce que les résultats soient contestés par l’opposition! Ah bon? Je pensais l’opposition… démocrate et bon perdant en Afrique…» Les élections ont ceci de particulier en Afrique que ceux qui sont au pouvoir et les organisent, ne les perdent presque jamais. Pour autant, le cas guinéen qui ne se présentait pas sous cet aspect, se prépare à nous offrir une contestation dont les citoyens pouvaient bien se passer. Saveur après saveur, tous les ingrédients sont actuellement réunis.

Nul n’est plus qualifié à être citoyen de la Guinée que les autres, pas plus les intellectuels dans leur suffisance que les chefs de groupes sociaux dans leur ignorance. Choisir un chef relève du sens commun, du respect et de la dignité humaine qui autorisent à écouter les inquiétudes des uns autant que celles des autres à huit jours des élections présidentielles en Guinée, faute de l’avoir fait auparavant.

Il est vrai que le temps va à l’encontre des contestataires de la procédure électorale, dans son ensemble, mais cela ne rend pas non pertinentes les observations dont ces personnes se sont donné la mission tardive. Tout, malheureusement, annonce des lendemains électoraux qui chantent faux en cette Guinée qui pourtant a besoin de l’harmonie la plus large pour faire son passage initiatique à une démocratie dont l’ensemble du pays a soif.

Il est difficile de livrer un blanc seing d’étanchéité à une structure de gestion des élections, la Commission électorale nationale indépendante (CÉNI), dont le président est condamné pour malfaisance. Naturellement, dans un environnement politiquement exemplaire, le président de la CÉNI, Ben Sékou Sylla, dès sa citation, devrait avoir formellement démissionné de cette fonction. Il se trouve maintenant qu’il est condamné à une sentence d’emprisonnement ferme, en plus d’être absent de la Guinée pour des raisons de maladie.

Impossible n’est pas guinéen
Le président de la CÉNI, condamné, malade et à l’étranger ou à l’étranger, malade et condamné; dans un sens ou l’autre, il y a un lourd déficit politique, une curieuse souillure historique et une insuffisance éthique certaine qui, ensemble, plombent l’envolée des espoirs démocratiques et campent ces élections dans une contestation facilement prévisibles si rien de significatif n’est fait dans ces jours cruciaux.

Mais alors, pourrait-on faire quelque chose d’acceptable dans les circonstances et malgré tout? « Impossible n’est pas guinéen! » entend-on. « Il peut être opéré une correction raisonnable et suffisante de la situation présente » ajoute-t-on. Cette correction résiderait davantage dans la bonne foi de la reconnaissance des insuffisances, plutôt que dans la surenchère juridique et déclaratoire qui s’est emparée de tout le monde à Conakry et au-delà.

Il est donc urgent d’aider la Guinée dans le sens du rétablissement précautionneux et sensé de la confiance jamais retrouvée, depuis les nombreux cafouillages de la CÉNI. Il ne s’agit nullement pour le médiateur Blaise Campaoré et son envoyé spécial de pointer du doigt les insatisfaits de tout bord qui se sentent toujours lésés par une administration électorale des plus approximatives. Il s’agit véritablement d’apporter des solutions pratiques que ces quelques jours décisifs pourront apporter dans le renversement du destin de la Guinée.

Il est alors difficile de passer à côté de la possibilité de changer, de manière consensuelle, le président de la CÉNI et son bras-droit Boubacar Diallo, coupables tout de même d’avoir fait détruire ou faire disparaitre complètement des procès-verbaux du premier tour des élections. Il est surtout impératif de combler les manquements administratifs de divers ordres, et souvent des omissions douteuses ayant trop souvent défavorisé le même camp dans cette course présidentielle de tous les dangers.

En réalité, la bonne foi et la preuve d’une capacité de bonne gestion électorale doivent être apportées par la CÉNI. C’est ce que, maladroitement, l’actuel premier ministre, Jean-Marie Doré, voudrait corriger il y a quelques jours en tentant de donner plus de place à l’administration publique, au détriment de la CÉNI elle-même, dans l’organisation du second tour présidentiel. Il en est sorti amoindri et désormais suspect aux yeux d’une certaine opinion guinéenne.

La Guinée est à un carrefour particulier. Ce dimanche 19 septembre 2010, quelques jours avant le premier anniversaire des tristes évènements du 28 septembre 2009 ayant sonné le glas du désormais tristement célèbre Moussa Dadis Camara en politique, de l’intérieur comme à l’extérieur, la Guinée est fébrile et cela se voit. Elle est surtout fébrile face au risque de perdre sa chance d’entrer dans l’histoire moderne; entrer définitivement dans la démocratie réelle ou perdre encore sa chance dans un avatar démocratique, difficile à corriger plus tard, comme il en pullule désormais en Afrique francophone, si ce ne sont carrément des démocratures, c'est-à-dire de vraies dictatures habillées de quelques attributs scintillants d’une démocratie tropicalisée qui fondrait sous l’effet des premières critiques dans n’importe quelle autre partie du monde. Tout commence bien et souvent patatras, tout s’écroule, faute d’une entente de bonne camaraderie que les institutions et les principaux protagonistes auront dessinée par leur seule volonté.

Au début de cet exercice électoral, les propos de l’envoyé spécial de l’Union africaine, M. Édem Kodjo, étaient prémonitoires à ce sujet : « Nous ne venons pas en donneurs de leçons (…) Nous venons en frères », persuadés que c’est avec un certain souci de la Guinée que cette étape déterminante vers la démocratie pourrait être franchie à la satisfaction de toutes les composantes de ce Peuple à « l’illustre épopée ».

Heureusement que la Guinée est là, « fière et jeune » de son histoire autant que de son avenir, une Guinée droite devant nous et appelant toujours au Travail, à la Justice et à la Solidarité, une Guinée dont l’Afrique attend encore d’être un modèle glorieux de son renouveau. Pour avoir souvent chanté et rêvé l’Afrique, c’est toute l’Afrique qui se doit aujourd’hui d’exhausser et d’exalter la Guinée à la démocratie, vraie et non faussée, vivement.




Horizon


Rédigé par psa le 11/09/2010 à 00:22
Tags : Afrique Guinée Élections Notez



Le triomphateur des génocidaires hutus, champion du développement, préoccupe par ses dérives. Mais l’ONU le considère comme un pilier de la politique de sécurité en Afrique. L’étoile de Paul Kagamé pâlit.


Le Dilemme Kagamé

Pourfendeur du régime génocidaire hutu, Paul Kagamé jouissait, il y a peu encore, d’une réputation enviable sur la scène internationale. Les soutiens anglo-saxons du président du Rwanda en ont fait l’archétype d’une nouvelle génération de leaders africains, dédié sans réserve à la reconstruction et au développement économique de son pays.

À raison, explique Peter Pham, vice-président du National Committee on American Foreign Policy, un institut de réflexion new-yorkais: «Personne ne nie que le Front patriotique rwandais de Kagamé a accompli des progrès remarquables.» «L’économie croît, les rues sont propres et sûres, la corruption est sous contrôle et les femmes occupent une place importante», note Charles Landow, directeur associé au Council on Foreign Relations, un autre centre de recherche américain, dans une tribune du New York Times intitulée «Le dilemme Kagamé». S’il bénéficie de ce que Peter Pham appelle une «culpabilité résiduelle» de la communauté internationale, inapte à prévenir l’horreur en 1994, «Kagamé plaît aussi, car il manie un discours politiquement correct. Nouvelles technologies, ouverture du pays, privatisations, environnement, tous les clichés du développement sont là», tempère un autre spécialiste.

Au cours des dix-huit derniers mois pourtant, le prestige de «l’hyper-président» rwandais s’est altéré. D’abord, fin 2008, un rapport onusien a dénoncé l’appui de Kigali à la milice tutsie de Laurent Nkunda, bourreau des populations civiles dans le Kivu, en République démocratique du Congo (RDC) voisine. Ensuite, cet été, les incidents de la campagne pour la présidentielle rwandaise (tentative d’attentat contre un dissident en Afrique du Sud, assassinat d’un journaliste et d’un opposant) ont alarmé les ONG et troublé les observateurs. Fin mai, le Département d’État américain s’est ainsi ému d’«actions inquiétantes» menaçant la liberté d’expression. «Une gouvernance démocratique et le respect des droits de l’homme sont de meilleurs gages de stabilité à long terme», a insisté Johnnie Carson, le responsable des affaires africaines à Washington.///////Angélique Mounier-Kuhn



Silence


Rédigé par psa le 10/09/2010 à 01:30



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