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Pierre S. Adjété
Pierre S. Adjété
Né à Lomé, PSA a fait ses études au Togo, au Gabon et au Canada. Économiste, administrateur et essayiste, PSA est un partisan assumé du «Grand Pardon» et un adepte de l’Éthique dans l’espace public; il est un acteur engagé dans des initiatives citoyennes et républicaines.




Lorsqu’on n’habite pas la France, on l’aime à la visiter par temps vacant. Quoi faire alors lorsqu’on sait que les frontières de la France ne sont fermées qu’à ceux qui veulent y entrer. Comme dirait Jean Chrétien -et c’est vrai puisqu’il l’a dit à une émission de Radio-Canada : « (…) s’il faut parler français pour être Québécois, qu’est-ce qu’on fait si l’on est muet » Sacré Petit gars de Shawinigan qui nous manque par ces temps froids ! Mais aujourd’hui, l’intrigue est française, retournons-y ! C’est donc ce que nous apprend ce beau texte qui a pour seule ambition –un pari admirablement gagné, de rendre compte de la télévision publique française qui se marionnettise par les mains élyséennes et amies. Ficelles et cadeaux de noël sont alors Tapie sur France 2. J’en ai savouré à mon réveil canadien, et je trouve que cela vaut bien le partage : un texte qui fait aimer la France par son petit écran. Bravo à ce Daniel Schneidermann de Libération.


SVP Sir Kozy, Une France Tapie, C’est un Écran en Cadeau du Ciel !
Sacré service public de la télé française ! Dans l’éternelle servilité héritée de l’ORTF, il trouve toujours le moyen de se surpasser. Même pendant la trêve, la sacro-sainte trêve, les bras en tombent encore. Après tant d’autres, voici donc le nième épisode des affaires Tapie. Résumons. 2008 aura été une excellente année pour l’ex-homme d’affaires, ex-ministre, ex-animateur de télé. A tort ou à raison, et malgré les démentis à répétition, on voit la main de l’Elysée derrière le miraculeux «tribunal arbitral» qui, court-circuitant la justice, lui a généreusement offert une quarantaine de millions d’argent public dans son contentieux contre le Crédit lyonnais, pour «préjudice moral». A tort ou à raison, de nombreux citoyens en ont été choqués. A tort ou à raison, l’opposition a demandé la création d’une commission d’enquête, à propos des conditions de ce court-circuitage. A tort ou à raison, les grands journaux télévisés ont été d’une discrétion de violettes sur tous ces épisodes, ne diffusant de l’audition parlementaire dudit Tapie qu’un moment où on le voit savamment au bord des larmes. Bien. Par ailleurs, la victime éplorée d’un si lourd «préjudice moral» a la chance de tenir l’affiche d’une comédie de boulevard ( Oscar), à Paris. Il y incarne un riche homme d’affaires, en butte à toutes sortes d’escrocs et aux quiproquos familiaux traditionnels du genre. Réécrivant à sa sauce le texte original, Bernard Tapie y règle ses comptes, au passage, avec les députés les plus pugnaces, dans la meilleure tradition des chansonniers. Sur scène, il ridiculise le prénom «Charles-Amédée» (Charles-Amédée de Courson est un des députés qui maîtrisent le mieux le dossier du Crédit lyonnais, et l’a mis en difficulté efficacement lors de cette fameuse audition par les parlementaires). «Jamais je n’accepterai que tu appelles ton enfant Charles-Amédée, quelle horreur !» s’exclame le personnage joué par Tapie. Il ridiculise aussi un nommé «François Bérou» (Bayrou est le seul dirigeant politique à s’être précipité sur tous les micros pour protester contre «l’arbitrage») «Il n’a plus personne !» s’esclaffe le personnage de Tapie en apprenant que «Bérou» tente de débaucher un de ses collaborateurs. Un personnage qualifié d’escroc et de voyou a «tout appris au Crédit lyonnais». L’allusion politique embrasse parfois plus large. Sur scène, on téléphone à «Brice le ministre» pour lui demander de fermer les frontières, afin d’empêcher la fuite du petit ami de Mademoiselle. «Ah, vous les fermez uniquement pour empêcher les gens de rentrer» s’exclame, désappointée, l’épouse de l’industriel, sous les rires de la salle. Quant au personnage de Tapie, est-il copain avec le président ? «J’en sais rien, certains disent oui, certains disent non. Et lui, quand on lui demande, il rigole.» La pièce, paraît-il, se joue à guichets fermés (il est vrai qu’elle a bénéficié d’une promo télé que bien d’autres spectacles lui envieraient). Tant mieux pour Tapie. ////Et France 2, dans l’affaire ?//// Elle ne trouve rien de mieux à faire que de diffuser la pièce de Bernard Tapie, en direct, le soir du 25 décembre, pour offrir une plus forte audience à ses railleries contre ses «persécuteurs» parlementaires. Apprenant la nouvelle de ce cadeau de Noël, on crut d’abord à une blague. Mais non. C’était vrai. Pensait-on que le mélange des genres allait faire reculer la chaîne ? Au contraire ! L’antenne du service public a bien été offerte, en direct, à Tapie, après une ultime autopromotion de la chaîne au 20 Heures, au cours de laquelle le présentateur appâta le public avec les fameux «règlements de compte» à venir. Et, au milieu d’un désastre de répliques nanardesques, et d’un festival de mimiques et de hurlements, Tapie en profita, comme prévu, pour caser ses répliques favorites (sans en rajouter, contrairement à ce que le buzz avait laissé prévoir pour pimenter l’événement). Qui s’offusque de voir le service public tenter de racoler l’audience en accommodant à la sauce rigolade les restes d’un scandale public ? Personne, ou presque. Quelques fous de théâtre (le comédien Jacques Weber, la critique de théâtre de L’Obs, Odile Quirot), au nom de la pureté de la scène. Mais au nom de l’impartialité du service public ? Pas les députés socialistes (il est vrai qu’ils ont beaucoup donné dans le «Vietnam parlementaire» et goûtent un repos bien mérité). Pas les critiques de télévision, ou les émissions sur la télé : elles font relâche. Pas l’ineffable CSA, qui vient de se laisser dépouiller sans protestation de son pouvoir de nomination du président de la télé. Il est peu probable qu’il décompte les sarcasmes de Tapie dans le temps de parole présidentiel, ou dans celui de la majorité. Quant à la morale publique, l’histoire retiendra qu’elle n’aura eu pour défenseurs que deux humoristes de France Inter, Stéphane Guillon et Didier Porte, seuls à avoir publiquement soulevé ce petit scandale. Et puis quoi ? Ce n’est que de la télé. Ce n’est qu’une pièce de boulevard. Et puis c’est Noël. L’épisode aura au moins démontré que Patrick de Carolis a parfaitement compris ce que l’on attend de lui. Une belle soirée de théâtre, comme au temps de l’ORTF. Une bonne manière à un personnage présumé bien vu de l’Élysée. Bienvenue, avec quelques soirs d’avance, dans le nouveau service public.

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Rédigé par psa le 30/12/2008 à 09:23
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Sur la Guinée, j’écrivais il y a quelques jours que « Finalement, dans un pays aussi tricoté serré comme la Guinée, le compromis demeure toujours possible, malgré les difficultés du moment. » Les faits tendent inexorablement vers ce nécessaire et salutaire compromis. Non seulement le défunt président a eu droit aux funérailles officielles assorties d’un « Pardon » général, mais aussi le chef de gouvernement sortant a fait allégeance à la junte qui l’a laissé vaquer à ses affaires et libre de ses mouvements, alors que des clameurs s’élèvent de partout –et pas seulement du président Abdoulaye Wade du Sénégal- pour saluer cette évolution comme un « moindre mal ». Louable consensus social pour une douche démocratique !


La Douche
La Douche
Au demeurant, aucune Constitution n’est respectée en Guinée. Les Coups d’État restent condamnables. Et les Africains n’ont besoin de nul autre pour le leur dire, eux qui ont fait l’expérience des Coups d’État depuis toujours. Les temps ont même tellement changé qu’oser emprunter la voie des coups de force pour accéder au pouvoir relève du grand aventurisme politique. Mais voilà qu’au moment même ou disparait Samuel Huntington, un des grands penseurs de la démocratie, l’auteur du fameux « Choc des civilisations» -dont les découpages simplistes restent tout à fait critiquables à mes yeux, nous nous devons de mettre de l’eau dans notre vin pour permettre l’avènement de la démocratie en Guinée. En fait, parfois cette démocratie nous déjoue pour emprunter des sentiers tortueux, interpellant même notre conscience de puretains... C’est tant mieux que nous ne devons rien prendre pour acquis. Mais le plus intéressant reste le contexte. En Guinée, le tissu social tricoté serré, c'est-à-dire bien intégré et encore respectueux des uns et des autres s’offre bien à cette tournure des choses à peu près consensuelle, sans règlement de compte aucun. Au contact de certains peuples africains, particulièrement dans leur milieu, j’ai été fasciné par ce naturel consensuel qui les parcourait, malgré la diversité de leurs composantes ethniques. Malgré ses difficultés d’entant, à travers cette expérience de coup d’État en cours, la Guinée récolte le fruit d’une certaine harmonie sociale dont le pays est porteur. Anciennement directeur Afrique à l’organisme canadien Droit et Démocratie, notre ami Akouétey Akakpo-Vidah est actuellement et curieusement en cette Guinée… L’idée me vient de penser qu’il saura analyser adéquatement cette extraordinaire expérience guinéenne pour la traduire dans son propre bilan, face à la contribution qui a été la sienne dans la gestion catastrophique qu’il avait le don de faire de la situation togolaise, seulement animé par un sentiment sournois, inefficace et peu raisonnable, politiquement. Et je m’en tiens là et là seulement devant une telle autre incompétence politique qui, heureusement, s’est effacée d’elle-même du portrait ! Oui, de telles expériences heureuses à travers l’Afrique mettent à nu l’échec politique du Togo dont les citoyens vivent un antagonisme dévastateur et insidieux, qu’ils ne sont plus capables de prendre des distances réparatrices et envisager sérieusement de se pardonner pour enfin passer à autre chose, au grand bien de leur pays et de leur propre ambition. Mais parler du Togo est une autre histoire. Mais j’entends déjà de ces voix simplificatrices qui bientôt publieront parallèles et similitudes inappropriés… Pour l’heure, de partout où nous sommes, demandons-nous simplement pourquoi un tel changement a pu s’amorcer malgré tout dans cette guinée pratiquement en déliquescence politique. Une de mes hypothèses est que le tissu social était moins déchiré en Guinée que dans une société hétéroclite d’Akodjokpli comme celle du Togo. Dire que le meneur du Coup d’État appartenait pourtant au cercle relativement proche du président défunt. Et pourtant la nécessité d’une autre Guinée l’a poussée à agir pour un bien supérieur : c’est de la pure éthique aristotélicienne en politique, celle qui doit nous donner jouissance. Ces pourtant amateurs et artisans putschistes de la nouvelle démocratie guinéenne méritent effectivement d’être soutenus et pardonnés… car au moins, ils savent ce qu’ils faisaient et pourquoi ils le faisaient! Au passage, saluons nos amis Ghanéens dont l’expérience démocratique commencée aussi dans la douleur se poursuit inexorablement et se concrétisera en beauté par les élections exemplaires de ce dernier dimanche de cette année de grâce 2008.

PS : Mon seul regret, parce que j’en ai, c’est de ne pas réussir à illustrer ce texte par l’œuvre fantastique dite « Annonciation, la vierge renversée » du grand photographe et artiste Anton Solomoukha d’après l’œuvre non blasphématoire de l’Annonciation de Caravaggio –nul autre que le réaliste Michelangelo Merisi lui-même. Je me contente de cette simple Douche pour terminer notre merveilleuse année qui pourtant aurait bien mérité cette majestueuse « Vierge renversée » devant symboliser cette démocratie qui parfois se présente à nous la tête en bas, carrément. Bon, La Douche restitue aussi cette beauté et cette simplicité transparente que j’aime dans l’art du nu… Et tant qu’à choisir, moi je préfère le nu féminin. Bonne année 2009 !
Un « Anton Solomoukha »  rassembleur pour faire la transition vers l’ère Obama.
Un « Anton Solomoukha » rassembleur pour faire la transition vers l’ère Obama.


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Rédigé par psa le 27/12/2008 à 17:17



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