Profil
Pierre S. Adjété
Pierre S. Adjété
Né à Lomé, PSA a fait ses études au Togo, au Gabon et au Canada. Économiste, administrateur et essayiste, PSA est un partisan assumé du «Grand Pardon» et un adepte de l’Éthique dans l’espace public; il est un acteur engagé dans des initiatives citoyennes et républicaines.




Vue plongeante sur le Togo... Incertitude
Vue plongeante sur le Togo... Incertitude
Quand la politique devient stratégie, il faut s’en féliciter. Mise à part les arrestations et les violences diverses de ce 10 aout 2010, cette date restera comme celle qui a confirmé le changement d’approche dans le camp des fidèles de Jean-Pierre Fabre (FIDO) dans leur lutte pour la garde de l’UFC. On voyait bien venir le 10 aout 2010 à travers le trou de serrure qu’était le 5 aout 2010. Déjà, dans une discussion, je faisais observer que c’est probablement l’un des plus grands coups politiques des FIDO. Pour qui connait les capacités de renseignements des services togolais, réussir à Lomé à les divertir suffisamment pour tenir un pré-congrès avec quelques 34 des 40 fédérations –auxquelles se joindra une autre plus tard, soit 35 sur 40 (pratiquement 88% des instances décisionnelles d’un congrès), relève d’une prouesse remarquable. C’est le témoignage que quelque chose se passe à l’UFC, tendance Fabre; quelque chose comme une approche plus stratégique.

C’est cette manière de redéfinir l’art politique qui s’est confirmée ce 10 aout 2010 à Lomé. Tout le monde avait le regard tourné vers le lieu du congrès des FIDO; tout le monde savait sur toute la planète Togo que le gouvernement ne laisserait pas faire ce congrès, puisque les autorités ont pris le parti de Gilchrist Olympio et de ses Amis, les AGO, dont les assises s’étalent sur les 11-12 aout 2010, normalement. Ce qui devait arriver arriva. Le jeu dangereux de la violence des rues a été mené par les jeunes militants-sympathisants des FIDO avec les forces de l’ordre, alors que les ténors s’affairaient à tenir rencontre tenant lui de congrès-caché avec des va-et-vient entre divers lieux de congressistes et autres sages, gentilshommes ou boy-scouts. Le dispositif des forces de l’ordre n’y a vu que du feu finalement. Pour une des rares fois, la maison UFC avait une stratégie qui a marché. La disponibilité de Jean-Pierre Fabre et sa trop grande visibilité jusqu’à faire une conférence de presse de chez lui -celui-là même qui s’était toujours opposé à cette méthode de la politique-de-salon qu’affectionnait Gil ces derniers temps, avaient laissé plané le doute en début d’après-midi sans éveiller trop de soupçons. Une nouvelle était d’ailleurs lâchée : «La composition du nouveau bureau national UFC sera connue dans la journée !»

Au total, les Patrick Lawson, Edem Atantsi, Jean-Claude Délava Codjo, Isabelle Améganvi, Octave Anthony et autres ont fait le travail de fourmie pour compléter le bureau, se permettant même le luxe d’y inclure des gens de la diaspora après leur accord formel, en plus de rafler tous les cadres connus au nez et à la barbe des AGO. Ces derniers vont devoir se contenter des seconds couteaux dans leur contre-attaque à venir. C’est l’histoire d’une folle et particulière journée politique. Elle ne solde pas la crise à l’UFC; elle constitue un gain pour les FIDO. Ces derniers auront toutefois toutes les peines du monde pour faire reconnaitre ce bureau par les autorités gouvernementales togolaises. Mais ce qui est sûre, la finesse des FIDO leur a permis de reprendre la main pour un petit temps… un petit temps seulement, car probablement que les nouveaux partenaires gouvernementaux des AGO vont les aider à constituer une liste avec autant d’envergure que celle qui soulève déjà l’enthousiasme des partisans FIDO.

De loin, je préfère ces saines stratégies politiques dans un parti politique en bisbille que les bruits de bottes et le rôle indu que le gouvernement togolais joue dans une affaire qui ne le concerne nullement. Il demeure que rien n’est joué. La prouesse insuffisante des services de sécurité togolaises prouve bien que le recours à une expertise extérieure, la française et particulièrement celle d'un excité de lieutenant-colonel du nom de Romuald Létondot, leur a fait perdre la réalité du terrain et son décodage adéquat. Pour l’instant, un gros bravo à la stratégie réussie des FIDO. C’est un bon coup! Pour quel lendemain? Incertitude.


Horizon


Rédigé par psa le 11/08/2010 à 01:00



Je sens l’âme d’une invitation à écrire... l’âme d’une autre incitation à la vigilance publique. Assez d’entendre qu’aucun dialogue n’est possible au Togo. Fini les je-vous-l’avais-bien-dit! Il faut sortir de l’école des ressentiments et marcher vers le Togo, là où il est étalé de tout son long –de Lomé à Cinkassé, et le relever d’une nouvelle intelligence et pour une nouvelle posture. Le président togolais qui devrait appeler ses véritables adversaires ne semble toujours pas avoir compris l’importance et la symbolique du verbe et de la communication; ce défi reste pourtant à sa portée. Il le demeure toujours.


Incitation à l’éveil patriotique : II




Le Togo n’en peut plus d’attendre. Il lui faut renouer avec la raison, toutes les raisons. La nation n’est pas une donnée, encore moins un cadeau du ciel. Elle se forge particulièrement dans les moments chauds et difficiles, et à coup de délibérations citoyennes, et en risquant davantage la démocratie : la seule certitude qui reste pour le salut du Togo.

Il y a un rôle nouveau à attribuer à la politique au Togo; c’est de l’utiliser comme un moyen pour venir à bout de nos suffisances d’abord, venir à bout de nos insuffisances ensuite; venir à bout de nos erreurs et de nos errements de ces vingt dernières années. Il en est ainsi, il est possible de penser ainsi car, par nature, la politique est pratique, la politique est l’art du possible. Et, lui donner une mission et un rôle de combler nos carences, c’est l’élever au niveau des ambitions de tous les Togolais d’avoir un pays autre, un État qui marche en rangs serrés, une République, une démocratie.

Il faut prendre le Togo là où il est, là où il se retrouve après ces années et mettre la politique à son service comme un levier. Mais il est vrai que tout cela ne peut se faire sans la bonne foi et loin de la tromperie qui a trop marqué la politique au Togo, loin de la violence gratuite administrée aux autres.

Il faut alors redéfinir un objectif commun et partagé, en termes d’étapes graduelles parfois anodines, sur lesquelles de larges consensus peuvent se faire. Et ainsi, par pallier, progresser vers l’objectif principal.

Il ne s’agit plus de jouer un Togo contre un autre, ni le nord contre le sud, ni la démocratie contre la dictature, ni les bons contre les mauvais, ni le RPT contre l’UFC, ni les forts contre les faibles encore moins les Faure contre les Fabre. Il s’agit de faire le Togo à partir du Togo, de faire le Togo avec les seuls matériaux disponibles : les Togolaises et les Togolais tels qu’ils sont et non tels que l’on voudrait qu’ils soient.

L’heure est vraiment grave; le spectacle est désolant. Fini les citoyens qui aiment rester dans la salle d’attente de leur propre pays; fini les donneurs de leçons et les irréductibles; fini les je-vous-l’avais-bien-dit; fini les seules-les-armes-feront-le-changement-au-Togo; fini les vous-me-donnerez-des-nouvelles-de-ce-Togo-dans-vingt-autres-années. Il faut remettre la main à la pâte, remettre la main à la patrie Togo.

L’esprit de révolte, désormais sublimé dans les marches hebdomadaires aboutissant sur les sables fins de Lomé et les pages Internet de la diaspora, doit quitter ce confort et emprunter le chemin de la convergence patriotique. Nul ne mettra fin ainsi aux marches, aux querelles et aux incantations virtuelles sur les sites Internet, certes; pas plus les arrêts des tribunaux que les arrêtés ministériels. Mais une certaine catégorie de personnes, les politiques, d’un côté comme de l’autre, doivent savoir qu’ils ne peuvent véritablement s’en tenir qu’à la seule force de leur imagination, la seule force de leur intelligence à mettre au service d’une solution de sortie de crise au Togo… C’est une invitation à l’éveil patriotique. Éviter que le Togo ne sombre dans la banalisation de la violence politique.

Silence


Rédigé par psa le 10/08/2010 à 22:00
Tags : Démocratie Togo Notez



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