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Pierre S. Adjété
Pierre S. Adjété
Né à Lomé, PSA a fait ses études au Togo, au Gabon et au Canada. Économiste, administrateur et essayiste, PSA est un partisan assumé du «Grand Pardon» et un adepte de l’Éthique dans l’espace public; il est un acteur engagé dans des initiatives citoyennes et républicaines.




L’opposition et la société civile dénoncent un scrutin joué d’avance sur fond de fraudes et de violences. La répression à laquelle les Frères musulmans sont soumis depuis cinq ans s’est accentuée pendant la campagne. Le vrai enjeu du scrutin, ce sera la présidentielle dans une année. Qui succédera à Hosni Moubarak? Pourquoi donc les Égyptiens boudent-ils systématiquement les urnes à chaque élection? Les observateurs s’attendent à ce que le scrutin législatif organisé ce dimanche ne rencontre pas plus de succès. Le président Hosni Moubarak a certes promis «des élections libres et honnêtes», mais cela résonne comme un aveu que ces qualités n’ont jamais caractérisé les joutes électorales précédentes.


Oprah par Edwards
Oprah par Edwards
Résumons. L’Égypte, pays arabe le plus peuplé (81 millions d’habitants) connaît un régime présidentiel à poigne qui repose sur l’état d’urgence en vigueur depuis l’assassinat du précédent président Anouar el-Sadate en… 1981. Un décor démocratique avait été planté, autour d’un parlement issu d’élections contrôlées par tous les moyens, y compris les plus grossiers. Quelques partis d’opposition sans socle populaire se disputaient les faveurs du régime pour grappiller des sièges au parlement. Jusque-là tout allait bien.


Dans les ruelles boueuses de Mit Namma, village défavorisé du delta du Nil, la rencontre entre le Frère musulman Mohamed el-Beltagui et des partisans de son rival du Parti national démocratique (PND) au pouvoir a failli mal tourner. Intimidations, provocations, échanges de coups: pendant plusieurs minutes, des jeunes, dont l’un armé d’une bombe aérosol transformée en lance-flammes, un autre fonçant dans la foule en moto, ont harcelé le cortège du candidat islamiste.


«C’est leur tactique habituelle», affirme Khaled Tantaoui, membre de l’équipe de campagne de Mohamed el-Beltagui. «Ils essaient de créer des violences pour que la presse officielle puisse écrire que nous sommes des terroristes.» Dimanche, au premier tour des législatives, «ce sera pire, ajoute-t-il, car ça servira de prétexte pour fermer les bureaux de vote. Ils savent que si les gens votent, ce sera pour le docteur Beltagui».

En 2005, ce médecin a été élu député dès le premier tour, capitalisant sur les œuvres sociales et la réputation d’intégrité de la confrérie. «La porte de son cabinet est ouverte à tout le monde, sans wasta (piston), il fait beaucoup de bien», assure une habitante. Cette année-là, il a aussi profité d’une relative ouverture politique, sous la pression des États-Unis. La confrérie interdite, mais tolérée, en a été la grande bénéficiaire en remportant un cinquième des sièges.

«À l’époque, décrypte Bahey el-Din Hassan, directeur de l’Institut du Caire pour les droits de l’homme, le régime avait besoin des Frères musulmans pour convaincre la communauté internationale qu’il n’y avait pas d’autre alternative que les islamistes. Mais le vote protestataire leur a permis d’obtenir des résultats meilleurs qu’attendus

«C’est une erreur qui ne se reproduira pas», a prévenu le ministre des Affaires parlementaires, Moufid Chéhab. La répression à laquelle la confrérie est soumise depuis cinq ans s’est de fait accentuée pendant la campagne électorale. Après la dispersion brutale de rassemblements, le week-end dernier à Alexandrie et dans le delta du Nil, et l’arrestation de centaines de leurs membres, les Frères musulmans ont dénoncé une «campagne de terreur» et Amnesty International a appelé à la fin des «mesures de harcèlement et d’intimidation».

La répression contre les islamistes pourrait permettre aux libéraux du Wafd de redevenir le principal bloc d’opposition et d’entretenir une «illusion de pluralisme», selon Bahey el-Din Hassan. Sans pour autant menacer la majorité des deux tiers nécessaires au PND pour conserver une maîtrise totale du processus législatif et constitutionnel à un an de la présidentielle.

Car le véritable enjeu des législatives est d’arbitrer une lutte intestine pour la succession d’Hosni Moubarak, 82 ans et que l’on dit très malade, entre «réformateurs» proches de Gamal Moubarak, le fils du raïs, et la «vieille garde», plus favorable à un candidat issu, comme ses prédécesseurs, de l’armée. Un combat illustré par la difficulté du PND à désigner ses candidats – ils sont plus de 700 –, ce qui a eu pour effet de retarder le début de la campagne électorale, qui a été réduite à deux semaines. C’est l’un des nombreux griefs de l’opposition à l’encontre d’un processus jugé totalement biaisé, alors que les précédentes élections ont été marquées, selon les observateurs, par des «fraudes massives et systématiques».

Malgré les promesses des autorités, «il n’y a pas de volonté politique d’avoir des élections transparentes et équitables», estime Stéphanie David, de la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH). Et d’énumérer les maux du pays: la loi d’urgence (depuis 1981), qui permet d’interdire rassemblements et manifestations; l’annulation de la supervision des bureaux de vote par les juges, seule garantie, jusqu’alors, d’un minimum de transparence; l’éviction, ces derniers mois, de journalistes critiques envers le pouvoir; ou encore la réaction épidermique des autorités à la proposition des États-Unis d’envoyer des observateurs internationaux et les restrictions imposées aux ONG locales.

«C’est la preuve que le régime a l’intention de frauder», affirme Georges Ishak, vétéran du mouvement d’opposition civile Kefaya. «Les Égyptiens vont encore une fois être volés
Un jeune copte blessé par balle mercredi lors des heurts entre la police et des manifestants chrétiens au Caire est décédé vendredi portant le bilan de ces affrontements à deux morts et plusieurs dizaines de blessés.

L’apathie politique des Égyptiens est avant tout conditionnée par l’évidente vacuité de l’enjeu politique: comme d’habitude, le Parti national démocratique (PND) de Hosni Moubarak va rafler la majorité absolue. Et puisqu’il existe une seule vraie opposition, la mouvance islamiste – les fameux Frères musulmans –, qui possède une solide base populaire, tout a été fait pour qu’elle rentre dans le rang. Tout, y compris la répression la plus brutale.


Mais le régime se fait vieux. Il rouille. Et maintenant il prend peur. Corrompu jusqu’à la moelle, impopulaire, souvent incompétent et volontiers violent (par exemple dans la répression des grèves spontanées de plus en plus fréquentes), il ne doit sa survie qu’à sa main de fer et au soutien de l’Occident. A ce dernier, raconte Alaa el-Aswany, le célèbre écrivain auteur du truculent Immeuble Yacoubian, «le message injuste suivant est envoyé: acceptez la dictature sinon préparez-vous à voir des fanatiques au pouvoir». Les Frères musulmans servent donc de repoussoir.

Candidatures invalidées

Ceux-ci, néanmoins, refusent de boycotter les élections (à dire vrai, le mouvement, pour la première fois, est cruellement divisé sur la question, mais il a été décidé, de justesse, de participer au scrutin de dimanche). Ils savent pourtant que les dés sont pipés. Plus de 1200 de leurs membres ont été arrêtés ces dernières semaines, dont plusieurs candidats, près d’un quart de leurs 135 candidatures ont été invalidées et la nouvelle loi électorale a retiré la supervision du scrutin aux juges, un corps parmi lequel on trouve une bonne proportion de gens honnêtes.

Les Frères musulmans savent donc qu’ils ne reproduiront pas le beau succès remporté en 2005 à l’Assemblée nationale (grâce à des candidats concourant sous l’étiquette d’«indépendants», puisque le mouvement n’est pas reconnu comme parti politique). A l’époque, ils avaient conquis 88 sièges en présentant seulement 160 candidats (il y avait 444 sièges à pourvoir). Cette fois, ils ne présentent donc que 135 candidats pour un futur parlement porté à 508 membres. Et un journaliste égyptien de renom a prédit qu’ils n’auront même pas 20 députés. Commentant les interpellations, Saad Kettani, un membre de la direction de la confrérie, a estimé lundi que «le régime envoie le message qu’il n’y aura pas d’élections; ce qui se passe est le trucage du vote».

Le régime compte sans doute sur le désintérêt d’une majorité des Égyptiens qui survivent dans des conditions sociales indignes. Le vent de fronde qui s’est levé ces dernières années au sein d’une certaine société civile reste assez marginal. Pour plus de sûreté, tout de même, les médias, qui jouissaient d’une embellie dans la liberté de ton, ont été attaqués, en sacquant des voix libres au besoin.

Le vrai enjeu
C’est que, au Caire, tout le monde le sait et le sent: l’enjeu, le vrai enjeu, c’est à l’automne 2011 qu’il se découvrira, lors de l’élection présidentielle. Qui succédera à Moubarak? A moins que, malgré la vieillesse et la maladie, il ne se représente. Le régime, de toute façon, cadenassera le scrutin pour que le vainqueur soit celui qu’il aura choisi. Personne n’en doute./////////// Baudouin Loos & Tangi Salaün


Silence


Rédigé par psa le 27/11/2010 à 17:17



Yves Beauchemin est l’auteur de Juliette Pomerleau et du célèbre Matou, traduit en 16 langues et adapté au cinéma et à la télévision en 1985. Dernier ouvrage paru: Renard bleu, 2009. Dans ce texte paru hier dans le Devoir sous le titre « Mort d’un politicien », Yves Pomerleau touche du doigt l’inconsistance particulière et le vide abyssal qui ont marqué le pouvoir de Jean Charest. Avec Jean Charest, tous ceux qui avaient de la hauteur et du contenu avaient fini par quitter le parti libéral du Québec (PLQ): Yves Séguin, Thomas Mulcair et autres. Le PLQ lui-même s’est transformé en « une énorme machine à ramasser de l'argent» d’après Robert Benoît, un ex-président du parti et ancien député libéral; une situation qui confortait de nombreux intérêts privés au cœur de l’État québécois et la mafia dans les offres des travaux publics, pudiquement appelés la construction. Dans ces conditions, les députés qui faisaient entrer plus d’argent au PLQ avaient plus de chance de devenir ministres puisque ceux et celles qui étaient ministres ont un niveau plus élevé de financement à réaliser par an... pour se maintenir ministre; une logique implacable. Le Premier ministre lui-même se faisant payer une prime par son parti, le PLQ, un émolument supplémentaire à son salaire officiel et longtemps gardé secret, la boucle était bouclée. Un ancien ministre de la justice du même Jean Charest avouant avoir subi des pressions pour nommer des juges… le bon peuple n’en peut plus!
Incompétence et corruption, le peuple demande à savoir, savoir au moyen d’une radioscopie générale –une commission d’enquête publique offrant des garanties aux intervenants et probables révélateurs, que Jean Charest refuse avec une obstination digne d’une province bananière, d’un pays bananeux et manioceux voulant à tout prix préserver les poissons des eaux troubles qui l’entourent et l’isolent désormais. Probable peine perdue! Adieu Jean Charest déclare Yves Beauchemin sous le glas d’une pétition publique populaire demandant la démission du premier ministre du Québec, probablement le moins qualifié, le moins bien formé pour ce poste… la seule ambition et le verbe ne peuvent suffire pour faire la politique. Jean Charest en est un parfait exemple de cette déroute inqualifiable pour qui trop de destruction n’est pas encore assez pour démissionner. Pour le Souverainiste et auteur à succès qu’est Yves Beauchemin, il reste « À retenir » de ce Fédéralisme convaincu qu’est Jean Charest, ces quelques points : mauvaise gouvernance, corruption généralisée et bye-bye Johnnie. « Que voulez-vous, c'est la vie! » dixit Jean Chrétien.


Adieu Jean Charest… Fédéraliste et Corrompu


Il y a la mort physique et la mort publique. Parfois, un politicien connaît la seconde avant la première. C'est ce qui vient sans doute d'arriver à Jean Charest. Sa réputation, au fil des mois, s'est transformée en un grand trou noir d'où s'échappent des odeurs de pourriture de plus en plus incommodantes. Le ras-le-bol de la population est en train de se transformer en éruption volcanique. «Assez, c'est assez!», entend-on de tous côtés.

Jamais un premier ministre du Québec n'aura essuyé au cours de sa carrière autant de rebuffades de la part de la population. Jamais il n'aura suscité autant de controverses. Jamais il n'aura inspiré autant de suspicion. L'affaire de la centrale du Suroît, celle de la privatisation du parc national du Mont-Orford, celle des écoles juives — et j'en oublie! —, autant de gifles qui l'ont obligé à des reculs humiliants mais inévitables.


Mauvaise gouvernance

La combine Tomassi pour l'attribution des places en garderies, le désespérant gâchis du CHUM, les révélations de la commission Bastarache sur la nomination des juges, la vague de boue qui traverse le monde municipal, déculottant un maire après l'autre: autant d'illustrations de la mauvaise gouvernance de l'équipe qu'il dirige et de son amour un peu trop prononcé pour l'ombre.


Son refus obstiné de créer une commission d'enquête sur l'industrie de la construction —, et cela, malgré une accumulation incessante de preuves et d'indices — ne fait que nourrir les doutes que l'on entretient sur les sources de financement de son parti. Et que dire de cet entêtement à nous imposer l'exploitation des gaz de schiste malgré la colère populaire et les mises en garde des scientifiques? Ne serait-ce pas une façon pour lui de remercier d'anciens collaborateurs qui viennent de trouver un emploi lucratif chez les gazeux?

Et puis, il y a cette façon qu'il a de défendre le français (en recul à Montréal) par de belles paroles vibrantes d'émotion, mais en prenant bien soin de rester les bras croisés afin de ne pas indisposer la moitié anglophone de sa base électorale.

De quel côté êtes-vous, John James?


Point de non-retour

Malgré son redoutable talent de débatteur. Malgré l'étonnante résilience du Québec pendant cette récession qui afflige l'économie mondiale. Malgré la solidarité un peu servile que manifestent les membres du Parti libéral pour leur chef pendant les tempêtes qui ne cessent de s'abattre sur lui et sur son gouvernement, le taux de popularité de monsieur Charest semble souffrir d'une incurable anémie.

Voilà longtemps qu'il montrait une préoccupante tendance vers le zéro. Aujourd'hui, avec cette pétition électronique qui réclame sa démission et qui grossit à une telle vitesse qu'elle fait planter le serveur de l'Assemblée nationale, quelque chose vient de se produire, comme le franchissement du point de non-retour.

C'est le rejet. Oh, pas total. Il faut un pays totalitaire, justement, pour atteindre les 100 % dans l'expression de l'opinion publique. Mais c'est un rejet massif. Et de plus en plus coléreux. Le commun des mortels commence à trouver ce premier ministre au salaire si longtemps secret un peu trop commun.


Quitter la scène

Qu'il fasse de l'air, comme on dit familièrement. Même ses alliés de toujours commencent à le trouver maladroit et de plus en plus encombrant. Il a beau être le premier ministre québécois le plus fédéraliste que l'on n'ait jamais connu, il nuit à la cause du Canada. Quelqu'un quelque part doit être en train de lui chercher une façon élégante — et bien payée — de quitter la scène.


Car il y a des rapprochements de termes dont la fréquence devient de plus en plus gênante pour les partisans du nation building. Par exemple, «fédéraliste» et «corrompu». Depuis trop longtemps, ces deux mots ne cessent de se côtoyer à toutes sortes d'occasions. On a déjà eu assez de mal à se dépêtrer du scandale des commandites, soupirent ces messieurs, n'en remettez plus, de grâce! Sinon, le Canada risque une amputation.

Adieu, monsieur Charest. Faut pas nous en vouloir. «Que voulez-vous, c'est la vie», dirait Jean Chrétien.


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